Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Syrie : L’histoire s’écrit sans les putschistes occidentaux par Gilles Devers, avocat du Front polisario et de l’autorité palestinienne

 

 par  auteurs à lire


 

Je dois faire attention de ne pas dire « l’Occident », mais bien « les putschistes occidentaux », c’est-à-dire une poignée de financiers, d’industriels et de politiques qui sont prêts à tout pour défendre leurs intérêts personnels, contre ceux de cette grande région du monde qu’est l’Occident.

C’est bien clair : nous sommes « l’Occident » - une terre de culture - alors qu’ils n’en sont que les destructeurs.

Et bien, ce clan putschiste occidental est en train de vivre une défaite considérable et humiliante qui ponctue, avec la guerre en Syrie, des années d’impérialisme, qu’ils ont organisées de A à Z, et qu’ils ont perdues de A à Z.

Ce 29 décembre, Poutine a annoncé un cessez-le-feu en Syrie. Un exercice risqué, vu le nombre de tentatives depuis six ans ? Sauf que cette fois-ci, tout a changé.

Trois documents ont été signés  : le cessez-le-feu entre le gouvernement syrien et l’opposition armée, les modalités de son respect et l’organisation de négociations de paix.

Poutine souligne : « Il y a peu, une réunion s’est tenue à Moscou entre les ministres des Affaires étrangères de Russie, de Turquie et d’Iran : ces trois pays ont pris l’engagement non seulement de contrôler mais aussi de garantir le processus de règlement de paix en Syrie. Cet événement s’est passé il y a quelques heures. Non seulement nous l’avons attendu depuis longtemps, mais aussi nous avons beaucoup travaillé pour s’en approcher. Il faut maintenant tout faire pour que ces accords entrent en vigueur, qu’ils soient mis en œuvre, de manière à ce que les équipes de négociateurs puissent arriver le plus rapidement possible à Astana (Kazakhstan), pour y débuter un véritable processus de paix ».

À 24 heures, on note quelques incidents, mais le cessez-le-feu tient, et il tiendra parce que la diplomatie a joué tout son rôle : à chacun ses droits, à chacun le respect de sa sphère d’influence.

I – Le cessez-le-feu

1/ L’accord est syrien, signé entre le gouvernement légitime et les groupes rebelles, à l’exclusion de ceux liés à Daech et au Fateh al-Cham, l’ex-Front al-Nusra, filiale d’al-Qaeda. Ceux qui misaient sur l’écroulement de l’État syrien pour en faire un nouveau territoire éclaté entre groupes djihadistes ou un État uni mais sous contrôle des États-Unis et d’Israël ont perdu. La Syrie reste la République Arabe Syrienne.

2/ Les garants du cessez-le-feu sont la Russie, l’Iran et la Turquie. Les putschistes occidentaux ont perdu, comme leurs alliés, le Qatar, l’Arabie Saoudite et les Émirats.

3/ La Russie était – si j’ai bien compris – abominable quand elle répondait au gouvernement légitime syrien dans le cadre d’un accord militaire, pour combattre des groupes armés. D’après ce que je lis, elle reste abominable quand elle parvient à imposer un cessez-le-feu, signé par toutes les parties, sauf Daech et al Qaeda. Merci de m’expliquer.

II – Et la Turquie ?

La Turquie, au centre de tous les enjeux, est aujourd’hui dans la main de Moscou et de Téhéran.

1/ Erdogan est affaibli comme jamais. Pays encore pivot de l’OTAN, la Turquie a rompu avec ses alliés de l’OTAN. Erdogan est décrit comme surpuissant, et il va organiser une réforme de la constitution, mais les évènements montrent qu’il n’est plus maître chez lui. Le putsch de juillet, la série d’attentats de ces derniers mois, et l’assassinat d’Andreï Karlov, l’ambassadeur de Russie à Ankara, illustrent la faiblesse du régime à l’intérieur. Sur le plan international, c’est pire : alors que depuis six ans, Erdogan misait tout sur le soutien aux groupes djihadistes pour obtenir le départ de El-Assad, il se trouve contraint d’être le garant d’un accord qui marginalise les djihadistes et laisse en place El-Assad ! Ce parce que c’était ça, ou une pente syrienne pour la Turquie, rien de moins... Le risque de contagion est en effet élevé car, pour les deux pays, ce sont les mêmes populations,... mais avec une question kurde renforcée pour la Turquie. La base de la politique d’Erdogan, c’était un axe Qatar - Arabie Saoudite - Turquie pour éradiquer El-Assad. On se retrouve avec un axe Russie - Iran - Turquie pour conforter El-Assad. Bon courage pour expliquer cela à la population turque…

2/ Erdogan a pour priorité absolue d’empêcher la constitution d’un territoire kurde dans le nord de la Syrie, qui deviendrait une menace pour l’intégrité turque. Or, les États-Unis et la France s’étaient engagés sur ce plan, et se sont appuyés sur les très efficaces combattants du PYD pour combattre Daech… Ce PYD qui est le bras armé du PKK. Mais la page est tournée. Les Kurdes sont abandonnés par les US et la France. Ils sont les grands sacrifiés des évènements actuels, et ne vont pas se laisser faire. La Russie et l’Iran ont pris des engagements pour tenir la question kurde, ce qui fait de la Turquie leur obligée, sachons le dire clairement.

3/ En se trouvant garante du cessez-le-feu, la Turquie reconnaît définitivement qu’elle finançait et armait les groupes djihadistes et que, si elle a accueilli tant de réfugiés syriens, c’était pour vider l’armée syrienne. Elle va devoir assumer cette responsabilité et dans le même temps gérer les désillusions, car la défaite d’Alep, qui est la sienne, ouvre le chapitre inévitablement destructeur des luttes des clans au sein de la rébellion syrienne, dont la région d’Idlib va être le terrain.

4/ L’assassinat de l’ambassadeur de Russie en Turquie par un policier turc a signé la faiblesse du régime turc, et l’inefficacité de la répression. La Turquie avait de quoi redouter la réaction russe… à juste titre. Celle-ci a été de velours, mais avec une main de fer : tu es incapable d’assurer la sécurité, alors c’est avec nous, ou c’est fini pour toi. Les contacts de Erdogan avec Lavrov, ministre russe des affaires étrangères, et Choïgou, ministre russe de la défense ont dû être, disons, particulièrement intenses.

5/ Les États-Unis sont perdus devant les évènements, et ils n’ont même pas été en mesure de répondre à la demande d’appui de l’armée turque, dans la bataille que celle-ci conduit depuis quelques semaines pour reprendre Al-Bab, un bastion de Daech. La semaine dernière, 16 soldats turcs ont été tués. Les États-Unis étant aux abonnés absents, c’est l’aviation russe qui est venue à la rescousse, pilonnant les positions de Daech. Vraiment, on passe d’une époque à une autre, mais il y aura un coût élevé pour Erdogan.

6/ A quel prix, la Turquie va-t-elle pouvoir rester dans l’OTAN, accueillant une stratégique base militaire des États-Unis, et contrainte de s’en remettre à la Russie et à l’Iran pour sauvegarder son intégrité ? Le peuple turc, happé par les choix irréfléchis de ses dirigeants, est désormais exposé à toutes les tensions et à tous les coups tordus.

III – L’accord de paix

Aujourd’hui, c’est le cessez-le-feu, mais demain ce sera les négociations de paix, qui vont s’ouvrir d’ici fin janvier à Astana. Les partenaires sont la Syrie, Russie, la Turquie, l’Iran et ce qui restera de la rébellion syrienne.

Mais qui y aura-t-il d’autre autour de la table ?

On se doute que Poutine, Lavrov et Choïgou vont tout faire pour y installer des pays arabes, au second rang bien sûr.

Sissi a rompu avec les États-Unis et l’Arabie saoudite, et l’Égypte sera là, ou pas loin.

Assuré d’une place aussi le Qatar, qui a lâché les djihadistes d’Alep, à la suite de deux accords passés avec la Russie. Le 6 septembre 2016, a été signé à Moscou un accord de coopération militaire entre la Russie et le Qatar, et surtout, le 10 décembre 2016, a été conclue la vente de 19,5% des actions de Rosneft, la société russe d’exploitation du pétrole et du gaz au fonds souverain Qatar Investment Authority (QIA), pour 11 milliards de dollars, faisant du Qatar le second actionnaire de Rosneft après l’État russe. On est là avec l’enjeu décisif de l’approvisionnement de l’Europe en gaz. Au premier rang des fournisseurs, se trouvera désormais la Russie, l’Iran et le Qatar, avec 50% des réserves mondiales de gaz naturel, et ces trois États vont pouvoir organiser les gazoducs en passant par la Syrie et la Turquie. Le revirement de la Turquie et du Qatar place l’Europe en situation de grande dépendance énergétique. Nos gouvernements, prisonniers de l’OTAN, sont des marionnettes des US, et on voit le résultat.

La Russie parviendra-t-elle à convaincre aussi l’Arabie Saoudite de venir à Astana ? L’Arabie Saoudite est au plus mal, lâchée par l’inconsistant Obama, lâchée aussi par la Turquie et le Qatar, embourbée au Yémen… Ce alors qu’un accord est certainement possible sur la base de la diplomatie russe : respect des États, et à chacun selon sa place et son influence. La présence de l’Arabie Saoudite à Astana assurerait la paix dans la région. L’Iran, le grand rival des Saoudiens, est rodé à l’hostilité US, alors que l’Arabie Saoudite se demande comment faire alors que la tutelle US s’est écroulée. Et sûr que Lavrov et Choïgou ont de plus quelques arguments convaincants…

Les États-Unis et leur caniche français ? May be… Poutine a d’un revers de main retourné les puériles provocations du pré-retraité Obama, pour garder les mains libres alors qu’il va devoir gérer quatre ans avec Trump.

En attendant, on sait qui dirige, et sur quelles bases.

Voir en ligne : sur son blog l’acualité du droit

 

Lien permanent Catégories : Monde 0 commentaire

Les commentaires sont fermés.