Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Europe - Page 2

  • L’Échiquier brisé : Brzezinski abandonne l’Empire

     

    par Algarath 

    Il y a de très fortes chances que vous ne lirez pas ce qui suit ailleurs, y compris dans la presse alternative française qui semble avoir des mois de retard concernant les changements qui s’opèrent aujourd’hui.

     

    Mais voici les faits, qui parlent et sans doute nous donnent espoir. Tout n’est pas noir car même ce pourri de Brzezinski a compris, contraint et forcé.

     

    Le principal architecte du plan de Washington pour gouverner le monde a abandonné le régime et a appelé l’Etablishment Américain à avoir des liens avec la Russie et la Chine.

     

    Alors que l’article de Zbigniew Brzezinski dans The American Interest intitulé « Vers une réorientation globale » a été largement ignoré par les médias, il montre que les membres puissants de la mise en place de politiques ne croient plus que Washington prévaudra dans sa quête pour imposer l’hégémonie américaine au Moyen-Orient et en Asie. Brzezinski, qui était le principal promoteur de cette idée et qui a élaboré le plan pour l’expansion impériale dans son livre de 1997 Le Grand Echiquier : Primauté américaine et ses impératifs géostratégiques, a fait volte-face et a appelé à une révision dramatique de la stratégie. Voici un extrait de l’article dans l’AI : « Comme son ère de domination mondiale se termine, les États-Unis ont besoin de prendre les devants dans le réalignement de l’architecture globale de puissance. Cinq vérités fondamentales concernant la redistribution émergente du pouvoir politique mondiale et l’éveil politique violente au Moyen-Orient signalent l’arrivée d’un nouveau réalignement global. La première de ces vérités est que les États-Unis sont encore politiquement, économiquement et militairement l’entité la plus puissante du monde, mais, compte-tenu des changements géopolitiques complexes dans les équilibres régionaux, ils ne sont plus la puissance impériale du monde entier. » (Vers un réalignement mondial, Zbigniew Brzezinski, The American Interest)

     

    “Plus le pouvoir impérial à l’échelle mondiale”, les Etats-Unis ? Comparez cette évaluation à une déclaration de Brzezinski faite des années plus tôt dans le grand Échiquier quand il a affirmé que les États-Unis étaient le “pouvoir suprême dans le monde.”

     

    “… La dernière décennie du XXe siècle a été témoin d’un changement tectonique dans les affaires mondiales. Pour la première fois, une puissance non-Eurasie a émergé non seulement comme un arbitre clé des relations de puissance eurasienne mais aussi en tant que puissance primordiale dans le monde. La défaite et l’effondrement de l’Union soviétique était la dernière étape dans la montée rapide d’une puissance de l’hémisphère occidental, les Etats-Unis, en tant que seul et, en effet, la première puissance véritablement mondiale »(« Le Grand Echiquier. Primauté américaine et ses impératifs géostratégiques, “Zbigniew Brzezinski, Basic Books, 1997, p. xiii)

     

    Voici plus de l’article paru dans l’AI : « Le fait est qu’il n’y a jamais eu de véritable” “puissance mondiale dominante jusqu’à l’émergence de l’Amérique sur la scène du monde … .. La nouvelle réalité mondiale décisive était l’apparition sur la scène mondiale de l’Amérique comme en même temps la plus riche et militairement le joueur le plus puissant. Pendant la dernière partie du 20e siècle, aucun autre pouvoir n’est même venu proche de cela. Cette époque est maintenant à sa fin ».(AI)

     

    Mais pourquoi « cette époque est maintenant à sa fin » ? Qu’est ce qui a changé depuis 1997 quand Brzezinski faisait référence aux États-Unis comme le « pouvoir suprême du monde » ?

     

    Brzezinski souligne la montée de la Russie et la Chine, la faiblesse de l’Europe et le «  réveil politique violent parmi les musulmans postcoloniaux », comme les causes immédiates de ce revirement soudain.

     

    Ses commentaires sur l’islam sont particulièrement instructifs en ce sens qu’il fournit une explication rationnelle pour le terrorisme plutôt que le passe-partout typique du gouvernement à propos de «  haïr nos libertés. » À son crédit, Brzezinski voit l’éclatement de la terreur comme le « jaillissement des griefs historiques » à partir du « ressenti profondément du sentiment d’injustice » non pas comme la violence aveugle de psychopathes fanatiques.

     

    Naturellement, dans un court article de 1500 mots, Brzezniski ne peut pas couvrir tous les défis (ou menaces) auxquels les États-Unis pourraient faire face à l’avenir. Mais il est clair que ce pourquoi il est le plus inquiet est le renforcement des liens économiques, politiques et militaires entre la Russie, la Chine, l’Iran, la Turquie et les autres pays d’Asie centrale. Ceci est son principal sujet de préoccupation, en fait, il a même anticipé ce problème en 1997 quand il a écrit L’Échiquier. Voici ce qu’il a dit :

     

    «  Désormais, les États-Unis pourraient devoir déterminer comment faire face aux coalitions régionales qui cherchent à pousser l’Amérique de l’Eurasie, menaçant ainsi le statut de l’Amérique en tant que puissance mondiale. » (P.55)

     

    « … Pour le mettre dans une terminologie qui nous ramène à l’âge plus brutal des anciens empires, les trois grands impératifs de la géostratégie impériale sont de prévenir la collusion et maintenir la dépendance de la sécurité parmi les vassaux, pour garder tout souple et protégé, et de tenir les barbares éloignés de s’allier ensemble. » (p.40)

     

    « … Prévenir la collusion … parmi les vassaux. » Tout est dit, non ?

    La politique étrangère irresponsable de l’administration Obama, en particulier le renversement des gouvernements en Libye et en Ukraine, a considérablement accéléré le rythme auquel ces coalitions anti-américaines se sont formées. En d’autres termes, les ennemis de Washington ont vu le jour en réponse au comportement de Washington.

     

    Le président russe Vladimir Poutine Fédération a réagi à la menace croissante d’instabilité régionale et à la mise en place des forces de l’OTAN sur les frontières de la Russie par le renforcement des alliances avec des pays sur le périmètre de la Russie et du Moyen-Orient. Dans le même temps, Poutine et ses collègues dans les BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud) ont mis en place un système bancaire alternatif (Banque BRICS et AIIB) qui finira par remettre en question le système du dollar dominé qui est la source US puissance mondiale, ou même celui des DTS. Voilà pourquoi Brzezinski a fait un rapide 180 degrés et abandonné le plan de l’hégémonie américaine ; parce qu’il est préoccupé par les dangers d’un système fondé sur le non-dollar résultant parmi les pays en développement et non alignés qui remplaceraient l’oligopole des Banques centrales. Si cela arrive, alors les Etats-Unis vont perdre leur emprise sur l’économie mondiale et le système de l’extorsion dans lequel sont échangés les greenbacks pour les biens et services de valeur touchera à sa fin.

     

    Malheureusement, l’approche plus prudente de Brzezinski ne devrait pas être suivie par la favorite présidentielle Hillary Clinton, qui est une croyante ferme dans l’expansion impériale par la force des armes. C’était Clinton qui a introduit le « pivot » dans le lexique stratégique dans un discours qu’elle a prononcé en 2010 intitulé “Pacific Century America”. Voici un extrait du discours qui a paru dans le magazine Foreign Policy :

     

    « Alors que la guerre en Irak serpente vers le bas et l’Amérique commence à retirer ses forces d’Afghanistan, les Etats-Unis se trouvent à un point de pivot. Au cours des 10 dernières années, nous avons alloué des ressources immenses à ces deux théâtres. Au cours des 10 prochaines années, nous avons besoin d’être intelligents et systématiques sur l’endroit où nous investissons du temps et de l’énergie, de sorte que nous nous plaçons dans la meilleure position pour soutenir notre leadership, sécuriser nos intérêts et promouvoir nos valeurs. L’une des tâches les plus importantes de l’art de gouverner américain au cours de la prochaine décennie sera donc de bloquer un investissement considérablement accru – diplomatique, économique, stratégique et autres – dans la région Asie-Pacifique … »Exploiter la croissance et le dynamisme de l’Asie est au cœur des intérêts économiques et stratégiques américains et une priorité pour le président Obama. Les marchés ouverts en Asie fournissent aux États-Unis avec des possibilités sans précédent pour l’investissement, le commerce et l’accès aux technologies de pointe … les entreprises américaines ont la nécessité de puiser dans la base vaste et croissante base des consommateurs de l’Asie … La région génère déjà plus de la moitié de la production mondiale et près de la moitié du commerce mondial. Comme nous nous efforçons de répondre à l’objectif du président Obama de doubler les exportations d’ici à 2015, nous sommes à la recherche d’opportunités pour faire encore plus d’affaires en Asie … et nos opportunités d’investissement dans les marchés dynamiques d’Asie “. ( “Pacific Century America”, secrétaire d’Etat Hillary Clinton “, Foreign Policy Magazine, 2011)

     

    Comparez le discours de Clinton aux commentaires de Brzezinski fait dans Chessboard 14 ans plus tôt : “Pour l’Amérique, le prix géopolitique principal est l’Eurasie … (p.30) … .. L’Eurasie est le plus grand continent du monde et est géopolitiquement axial. Une puissance qui domine l’Eurasie contrôlerait deux des trois régions les plus avancées et économiquement productives du monde. … 75 pour cent des habitants de la planète vivent en Eurasie, et la plupart de la richesse physique du monde est là aussi, à la fois dans ses entreprises et sous son sol. L’Eurasie représente 60 pour cent du PNB mondial et environ les trois quarts des ressources énergétiques connues du monde “. (p.31)

     

    Les objectifs stratégiques sont identiques, la seule différence est que Brzezinski a fait une correction de cours basée sur l’évolution des circonstances et de la résistance croissante aux Etats-Unis du fait de l’intimidation, de la domination et des sanctions. On n’a pas encore atteint le point de basculement de la primauté US, mais ce jour approche rapide et Brzezinski le sait.

     

    En revanche, Clinton est encore entièrement engagée à étendre l’hégémonie des États-Unis à travers l’Asie. Elle ne comprend pas les risques que cela pose pour le pays ou le monde. Elle va persister dans les interventions jusqu’à ce que les États-Unis par la guerre de décision de ce mastodonte est stoppé net qui, à en juger par sa rhétorique hyperbolique, va probablement se produire quelque temps dans son premier mandat.

     

    Brzezinski présente un plan rationnel, mais égoïste de minimiser les conflits futurs, éviter une conflagration nucléaire et de préserver l’ordre mondial. Mais la sanguinaire Hillary ne suivra pas ses conseils. Aucune chance.



    Lien permanent Catégories : Europe, Monde 0 commentaire
  • La « petite » Wallonie plus peuplée que 6 Etats souverains de l’UE. Et plus démocratique que 27.

    L’Europe telle qu’elle se fait, Propos du moment Ajouter un commentaire

    Les chiens de garde des firmes privées, indûment dénommés « journalistes, » rivalisent pour exprimer leur mépris de la Wallonie : « petite province », « petite région »,  qui « ose défier 500 millions d’Européens », qui « prend en otage » toute l’Europe (la « prise en otage » est une formule souvent utilisée par ces ennemis de la démocratie et de la justice sociale ; elle équivaut à traiter hier les grévistes, aujourd’hui les Wallons  de terroristes – on voit la violence du propos). On les entend sur les chaînes de télé et les stations de radio publiques et privées ; on les lit dans 99 % de la presse quotidienne et 90% de la presse hebdomadaire.

    Comme ces propagandistes, le plus souvent largement incultes, méprisent aussi la réalité des faits, voyons  ce qu’il en est en comparant la population de la Wallonie à celle de certains Etats souverains, membres de l’UE :

    la Wallonie : 3.589.744 habitants .

    Lituanie : 2.921.262

    Slovénie : 2.062.874

    Lettonie : 1.313.271

    Chypre : 847.008

    Luxembourg : 562.958

    Malte : 429.344

    Si on ajoute à la population wallonne celle de Bruxelles (dont le Parlement est lui aussi hostile au CETA) : 3.589.744 + 1.175.173 = 4.764.917

    ce qui veut dire  plus que l’Irlande (4.625.884) et la Croatie (4.225.316).

    A la vérité des chiffres s’ajoute celle, plus importante, de la souveraineté démocratique : un Parlement démocratiquement élu, qui a étudié pendant deux ans le résultat de 5 ans de négociations ultra-secrètes (ce que les propagandistes médiatiques passent tout le temps sous silence), s’est démocratiquement exprimé. La Constitution de la Belgique lui fait devoir d’examiner et de ratifier (ou pas) des traités de ce genre.  

    C’est tout cela que les oligarques de la Commission européenne,  aux ordres de Goldman Sachs, méprisent, comme ils ont méprisé le référendum grec. Ces gens au service du monde des affaires et de la finance sont les premiers responsables des populismes et des nationalismes renaissants. Traité après traité, directive européenne après directive européenne, ils enlèvent  aux gens le peu qu’ils avaient de la maîtrise de leur destin. Et, avec la complicité des gouvernements de moins en moins représentatifs des attentes des peuples, ils persévèrent.

    Le CETA, la TTIP (Tafta), le TISA sont des instruments de démantèlement des Etats au profit des multinationales. Telle est, en fait, la véritable raison d’être de l’Union européenne : détruire les Etats. Ce qu’elle fait en renforçant des institutions supranationales à l’abri de tout contrôle démocratique (Commission, Banque Centrale, Cour de Justice de l’UE), en démantelant les services publics, en s’attaquant aux programmes scolaires (le livre blanc de Bruxelles de 1995, confirmé en 2000) dont l’objectif est de faire disparaître toute conscience nationale et citoyenne.

    Avec comme but ultime, transformer l’espace européen en colonie des Etats-Unis. Ceux-ci en ont besoin pour maintenir leur domination sur la planète. D’où le travail de taupe, dans chaque pays, d’ élites politiques formées à servir les intérêts US et diplômées « young leaders ». Il y en a dans tous les gouvernements, peu importe la couleur politique. En France, le travail de désintégration de l’école publique, la vente de l’Education nationale à Microsoft par l’actuelle ministre, ne sont que l’application de cet objectif. Il en va de même de la vente, par pans entiers, du patrimoine industriel, et de l’effacement de la politique culturelle et de la défense de la langue française.

    Il n’y a pas de complot. Ces gens avancent à visage découvert (par ex, la liste des Young leaders est publique). Le drame : il n’y a plus rien en face d’eux. La social-démocratie s’est vendue dans toute l’UE (toute ? non ! Il y a la Wallonie, pour le moment) au néo-libéralisme le plus débridé. Souvent au nom d’une Union européenne qui n’est que le cheval de Troie des USA.

    Une opportunité se présente grâce au  à la résistance wallonne au CETA qui popularise le sujet : mettre ces traités et l’UE au coeur de la campagne électorale pour la présidence de la République et ensuite pour les législatives. Interpeler les partis et les candidats sur ces questions et refuser leurs généralités qui noient le poisson. Nous avons besoin, à ce tournant de l’histoire, qu’on nous propose des options claires : une UE colonie US ou une union des peuples d’Europe qui le veulent fondée sur l’impératif de la souveraineté populaire et organisée par la seule coopération gouvernementale (la seule chose qui marche aujourd’hui : Airbus, Ariane, etc), tant il est manifeste que l’UE actuelle n’est pas réformable comme l’ont démontré les choix des dix années écoulées.

    Ne laissons pas occulter l’essentiel par les thèmes sarkozystes si souvent repris par le tandem Hollande-Valls. Ne subissons plus les médias toxiques. Soyons exigeants. Nous sommes le peuple !  Décolonisons l’Europe de l’UE !

    Lien permanent Catégories : Économie, Europe, Monde 0 commentaire
  • L'EURO et l'austérité

    par MS21

    Banque Centale Européenne ( Frankfurt)

    Banque Centale Européenne ( Frankfurt)

    La privatisation des emprunts d’État entérinée, organisée par les traités de l’Union européenne (UE) a marqué la fin de la période dite des « Trente glorieuses ». La monnaie, de facilitateur des échanges économiques devient elle-même une marchandise à part entière et objet de transactions. Un tel système a pour fonction d’augmenter les profits des capitaux avec pour corollaire un accroissement de l’appauvrissement de la société civile. Nous évoquerons la mise en œuvre dans l’UE des mécanismes à l’origine des crises que nous connaissons, en Allemagne d’abord où les salariés victimes d’une purge sociale, vont faire les frais de la compétitivité de leur pays. Cette compétitivité qui s’exerce au détriment des autres pays de la zone, conduit ceux-ci à systématiser l’austérité chez eux. C’est à cette contrainte que répond chez nous l’actuelle réforme du code du travail, ce que les responsables politiques se gardent bien de reconnaître. Les règles de la monnaie unique euro systématisent ces contraintes à tous les pays de la zone euro et l’Allemagne qui en est la grande bénéficiaire bloque toute évolution du système.La France dispose pourtant de nombreux atouts pour mettre en œuvre une politique d'émancipation : elle doit retrouver sa souveraineté, reprendre en main son destin et passer de la guerre économique dans l'Union à la coopération européenne.

     

    Dans l'histoire du capitalisme la période qui a suivi le deuxième guerre mondiale, appelée "les Trente glorieuses" constitue une parenthèse incongrue. L'humanité avait failli sombrer définitivement dans la barbarie par la faute d'un capitalisme au comble de sa logique prédatrice. Les gouvernements occidentaux n'étaient pas parvenus à juguler les effets de la crise économique de 1929. Conscients que cette crise avait été la cause de la montée du nazisme et soucieux de préserver les fondements du système, ils entreprirent de le réformer. Pour tenter d'éviter les crises économiques, ils décidèrent de favoriser le pouvoir d'achat par un système de redistribution. Ce système fonctionna aussi longtemps que le capitalisme – dont l'esprit est de viser l'enrichissement d'une minorité – jugea de son intérêt de le tolérer.

    Dès 1971, les États-Unis cassaient le système dit de Bretton-Woods qui, établissant une parité entre l'or et le dollar limitait le développement de la finance étasunienne. En France, le 3 Janvier 1973 Valéry Giscard d'Estaing, ministre des finances de Georges Pompidou, ancien fondé de pouvoir de la Banque Rothschild, décidait que L’État Français ne devrait plus se financer auprès de la Banque de France, mais devrait emprunter avec intérêt aux banques privées. Le capital privé prend alors la main sur les dépenses de l’État.

    En 1992 le traité de Maastricht va imposer cette règle à l’ensemble de l’Union européenne et il établit pour l’Union européenne une monnaie unique, l’euro.

    En France, dès 1973 des mesures d'économie drastiques destinées à satisfaire aux futurs critères de Maastricht et à rendre la France « euro-compatible » provoquent de facto la baisse du pouvoir d'achat et donc de la consommation. La croissance indispensable aux profits dépendant de la consommation, il importe de la maintenir coûte que coûte. La finance mondiale invente alors les crédits hypothécaires nés de la certitude des financiers, (en réalité de l'illusion) que les prix de l'immobilier ne peuvent qu'augmenter !... Ainsi naît la crise dite des « subprimes » qui partie des États-Unis touche l'Espagne, la Grèce, le Portugal, l'Irlande, l'Italie... Peu à peu les ménages les moins aisés ne pourront plus faire face aux échéances. On en connaît les dégâts sociaux... Enfin, les autorités européennes, soucieuses d'élargir l'Union européenne ont fermé les yeux sur le maquillage de la dette grecque - maquillage auquel la banque Goldman Sachs a prêté son concours. Les Européens ont fait le pari que la monnaie unique obligerait les pays à "converger" vers ceux qui sont les plus industrialisés en mettant en œuvre des mesures d'austérité qui favoriseraient leur compétitivité. Pari perdu, nous le voyons tous les jours mais moins douloureusement certes que les Grecs !

    Lire la suite

    Lien permanent Catégories : Économie, Euro, Europe 0 commentaire
  • Désindustrialisation de la France

    Désindustrialisation de la France

    par MS21

     Désindustrialisation de la France

    Un emploi industriel génère 3 à 12 emplois dans les services, l'inverse non. La France est devenue depuis plus de 30 ans le théâtre d'une désindustrialisation orchestrée dans des domaines aussi variés que la recherche médicale, les télécommunications, l'atome, l'aéronautique, la sidérurgie, les transports, l'agriculture, l'énergie, la culture. Nous reprenons l'analyse de Jean-Pierre Escaffre portée par une réflexion collective du Groupe Babeuf.

    Politique industrielle : un système qui se délite

    On assiste depuis plus de vingt ans à un inexorable processus de désindustrialisation de la France qui se traduit par une perte de souveraineté dans des secteurs clés de l’économie nationale et amplifie de façon dramatique le chômage de masse. Il est important de comprendre les mécanismes invariants qui interviennent dans cette dérive et de voir qu’il s’agit là d’une conséquence directe de la mise en œuvre institutionnelle et économique de la logique néo-libérale telle qu’elle a été formalisée par le projet de Traité constitutionnel européen (TCE), devenu par la suite le Traité de Lisbonne.

    En politique, il faut distinguer deux plans : celui des règles du jeu définies par les institutions, les lois, et celui du jeu proprement dit, soit la façon dont les peuples et leurs gouvernants se comportent dans le cadre de ces règles. En effet, une fois définies, les règles du jeu politique ne laissent souvent aux dirigeants qu’une marge de manœuvre réduite qui a peu de chances d’influer sur le cours des événements. Or, ces fameuses règles qui régissent les grands leviers de l’économie en Europe depuis plus de trente ans sont maintenant bien connues. Il s’agit:  du libre-échange généralisé,  d’une monnaie forte,  de la financiarisation dérégulée de l’économie.

    Ces principes ont été constitutionnalisés il y a onze ans dans le fameux TCE. Parmi les nombreuses conséquences sociales et économiques particulièrement délétères de ces principes, il y en a une que la plupart des médias passent sous silence ou qu’ils évoquent hypocritement en accusant le « coût salarial trop élevé » ou le poids insupportable des « charges sociales » : il s’agit du processus progressif et inexorable de destruction de l’activité industrielle dans notre pays.

    On peut souligner que ce déclin s’est traduit par la perte sèche, en France, de plus d’un million d’emplois dans le secteur industriel depuis dix ans ou une perte de 2,2 millions d'emplois durant ces 40 dernières années. La part de ce secteur dans le PIB est en chute constante : 22% en 1970, 18,4% en 1999, 13,6% en 2008 et 11% en 2011. Représentant 9,3% du PIB, la part dans la valeur ajoutée du secteur manufacturier en France est désormais parmi les plus faibles d'Europe. La part de marché de la France au sein de la zone euro entre 2000 et 2010 n'a cessé de diminuer, l'écart avec l’Allemagne serait de 250 milliards d’euros. La France depuis plusieurs années est passée d'un pays à haute technologie à un pays à moyenne et basse technologie.

    Mais il n’est pas inutile de regarder - en passant en revue quelques secteurs essentiels de l’économie – comment, et au bénéfice de qui, a été organisé ce naufrage national.

    Un cas exemplaire : la Compagnie Générale d’Électricité (CGE)

    La Compagnie Générale d’Électricité (CGE) est née en 1898. Très liée au pouvoir politique et s’appuyant essentiellement sur des marchés publics, elle va s’accroitre par fusions et acquisitions successives suivant cinq spécialités : le transport ferroviaire, l’électricité, les télécommunications, le matériel de défense et l’électronique. Ả partir des années 1980, on assiste à un scénario type de cette période qui est une gestion capitaliste par le duo droite-gauche: nationalisation quand ça va mal et privatisation quand l’entreprise est à flot, le tout agrémenté de scandales divers. Ainsi en 1982 (Mauroy) la CGE est nationalisée, en 1987 (Balladur) elle est privatisée, et à la suite d’un véritable jeu de piste labyrinthique de nouvelles fusions-acquisitions, elle donne naissance en 1998 à trois grandes sociétés différentes : Alcatel, Alstom et Cegelec.

    La suite n’est qu’un lent naufrage. Ces trois sociétés vont représenter dix ans plus tard trois énormes échecs industriels que l’on peut caractériser avec quelques invariants présents dans de nombreux secteurs :

    - Une gestion hasardeuse et désastreuse — avec la complicité d’un corps d’État peu soucieux de l’intérêt de la Nation — entraînant, sous la pression de la concurrence, des vagues de licenciements.

    - Une corruption généralisée doublée d’enrichissements personnels indécents.

    - Et surtout la perte de pouvoir et de souveraineté de l’État français sur des secteurs clés de l’économie avec la pénétration de capitaux et entreprises anglo-saxonnes dont la plus emblématique dans le cas évoqué est certainement la société américaine General Electric (GE).

    Ce dernier point est méconnu et mérite d’être illustré. D’abord en revenant sur trois sites emblématiques : à Belfort, GE a acheté des savoirs à Alstom dans les turbines électriques, à Buc, GE a acheté la Compagnie générale de radiologie qui va devenir GE Healthcare — la France perdant ainsi son industrie en imagerie médicale — et GE s’est aussi installé au Creusot (GE oil and gas). On notera ensuite qu’Alstom, dans sa débâcle, a vendu en 2006 un des fleurons industriels de notre pays, la société Converteam devenant en 2011 la propriété de GE qui a acquis ainsi les savoirs français dans la conversion électrique, y compris celles concernant les nouvelles énergies. On rappellera enfin — évidemment sans aucune arrière-pensée polémique — que GE France est gérée par Mme Clara Gaymard, épouse de l’ancien ministre UMP…

    La Compagnie Générale des Eaux

    L’histoire de la Compagnie générale des Eaux, créée sous Napoléon III, ressemble à celle de la CGE. En 1996 elle est devenue la société Vivendi dont le PDG J.M. Messier se faisait appeler J6M (Jean Marie Messier, Moi-même, Maître du Monde). Cela n’empêche pas Vivendi, embourbé dans l’achat des studios Universal, de déclarer en 2002 des pertes records. J.M. Messier doit démissionner en réclamant au passage la bagatelle de 20 millions de dollars d’indemnités… Vivendi va alors, suivant la technique de l’enfumage par le changement de nom, se scinder en deux : Vivendi (médias, jeux) qui est endetté à hauteur de 14 milliards d’euros et Veolia (eau, transport, énergie). Mais Veolia, à son tour, va sombrer. Son PDG , Henri Proglio — futur invité de Sarkozy au Fouquet’s — va bénéficier de la part de l’État d’un régime fiscal de faveur. Mais ça ne suffit pas !! L’État va donc « coller » Véolia à EDF dans une société commune et fin 2012, EDF est endetté de 40 milliards d’euros. EDF a donc servi de « vache à lait » pour Véolia avec les conséquences que l’on connaît : les effectifs d’EDF ont diminué de plus de 30 000 postes et le prix de l’électricité pour le consommateur n’a cessé d’augmenter.

    France-télécom

    Le dossier France-Telecom pourrait prêter à sourire tant il illustre jusqu’à la caricature les pratiques du capitalisme financiarisé. Créée par la puissance publique et issue de la recherche publique, la société de haute technologie France Telecom (FT) naît en 1988. Elle est privatisée par la droite en 1996 sous Alain Juppé et après six années d’une gestion ultra-compétitive par Michel Bon — et l’acquisition d’Orange — FT est en dépôt de bilan et devient la deuxième entreprise la plus endettée au monde avec une dette de 70 milliards d’euros ! Alors, on appelle un autre prodige de la gouvernance, Thierry Breton, qui doit « dégager » 15 milliards d’euros d’économie en interne. En 2004, l’État passe en dessous de la barre des 50% du capital et, 115 ans après sa nationalisation, le téléphone redevient complètement privé en France. En 2005, arrive à la tête de FT-Orange, Didier Lombard. Celui-ci commence par s’octroyer un salaire de 1,7 million d’euros, impose une gestion « à l’américaine » en donnant l’ordre de pratiquer un management violent avec un objectif simple : licencier plus de 20 000 employés. Bilan des courses : entre 2008 et 2009 plus de trente suicides ont lieu à FT et Didier Lombard a reçu — pour ses bons et loyaux services — la Légion d’Honneur remise par …Thierry Breton. Fin 2011 la dette de FT s’élevait à 33 milliards d’euros, près de 80% des résultats étaient distribués aux actionnaires et le nombre de salariés était passé de 240 000 en 1993 à 170 000.

    La sidérurgie

    Encore une fois, dans la sidérurgie, le même scénario se répète. Après la deuxième guerre mondiale, c’est la CECA (Communauté européenne du charbon et de l’acier) qui organise la concurrence. Renforcée par le choc pétrolier de 1973, elle va provoquer un effondrement de la sidérurgie que cela soit sur le mode privé (famille Wendel) ou public (nationalisation en 1981). Les chiffres ici sont impressionnants même s’ils traduisent difficilement l’étendue des dégâts sociaux notamment dans une région comme la Lorraine : entre 1975 et 1987, plus de 80 000 emplois sont détruits et plus de 100 milliards de Francs sont engloutis. Une fois « le ménage » effectué, on assiste comme par hasard à une dernière privatisation (Usinor-Sacilor en 1995) et à la pénétration du capital par les fonds de pension américains à hauteur de 40%. En 2006 l’indien Mittal lance une OPA contre Arcelor, appuyée par la banque Goldman Sachs et l’Union européenne (UE). Depuis 2009, Mittal a commencé à fermer les hauts fourneaux de Gandrange, Florange, ainsi qu’en Belgique, au Luxembourg etc… Rassurez-vous quand même : le groupe de Wendel s’appelle Wendel Investissement ; c’est une société financière investissant dans des entreprises à des fins de spéculation et dont le chiffre d’affaire annuel est de 5 milliards d’euros ; la famille de Wendel détient 35% de la société et nourrit 950 membres de « sa tribu ». Mais à la différence de l’Allemagne, la France n’a plus de sidérurgie.

    Nous pourrions continuer sur la lancée en évoquant les chantiers navals de Saint Nazaire, le bradage de l’aluminium avec Péchiney, le scandale du rattachement de GDF à Suez, celui de la société Vinci et la chute lamentable de Thomson. Mais une constatation s’impose maintenant à tout citoyen soucieux de la souveraineté de sa Nation : depuis trente ans une oligarchie financière, renforcée par l’Union européenne, a méthodiquement dépossédé notre pays de la majeure partie de son industrie. Le récent « sauvetage » du site d'Alstom à Belfort n'est qu'un pis-aller mis en place en urgence pour éviter une trop forte contestation des ouvriers qu'il faut « rassurer » à six mois des élections présidentielles. C’est une politique à court terme qui ne garantit pas la pérennité du site de Belfort.

    Lien permanent Catégories : Économie, Europe 0 commentaire
  • Entretien avec Samir Amin : L’affirmation de la souveraineté nationale populaire face à l’offensive du capital


    resolver
     

    Les analyses portant sur la crise qui secoue -de manière structurelle – le système capitaliste actuel s’avèrent être d’une stérilité pitoyable. Mensonges médiatiques, politiques économiques anti-populaires, ondes de privatisations, guerres économiques et « humanitaires », flux migratoires. Le cocktail est explosif, la désinformation est totale. Les classes dominantes se frottent les mains face à une situation qui leur permet de conserver et d’affirmer leur prédominance. Essayons d’y comprendre quelque chose. Pourquoi la crise ? Quelle est sa nature ? Quelles sont actuellement et quelles devraient être les réponses des peuples, des organisations et des mouvements soucieux d’un monde de paix et de justice sociale ? Entretien avec Samir Amin, économiste égyptien et penseur des relations de domination (néo)coloniales, président du Forum mondial des alternatives.

     

    Raffaele Morgantini (Investig’Action) : Depuis plusieurs décennies vos écrits et vos analyses nous livrent des éléments d’analyse pour déchiffrer le système capitaliste, les relations de domination Nord-Sud et les réponses des mouvements de résistance des pays du Sud. Aujourd’hui, nous sommes entrées dans une nouvelle phase de la crise systémique capitaliste. Quelle est la nature de cette nouvelle crise ?

    Samir Amin : La crise actuelle n’est pas une crise financière du capitalisme mais une crise de système. Ce n’est pas une crise en « U ». Dans les crises ordinaires du capitalisme (les crises en « U ») les mêmes logiques qui conduisent à la crise, après une période de restructurations partielles, permettent la reprise. Ce sont les crises normales du capitalisme. Par contre la crise en cours depuis les années 1970 est une crise en « L » : la logique qui a conduit à la crise ne permet pas la reprise. Cela nous invite à poser la question suivante (qui est d’ailleurs le titre d’un mes livres) : sortir de la crise du capitalisme ou sortir du capitalisme en crise ?

    Une crise en « L » signale l’épuisement historique du système. Ce qui ne veut pas dire que le régime va mourir lentement et paisiblement de sa belle mort. Au contraire, le capitalisme sénile devient méchant, et tente de survivre en redoublant de violence. Pour les peuples la crise systémique du capitalisme est insoutenable, par ce qu’elle entraîne l’inégalité croissante dans la répartition des revenus et des richesses à l’intérieur des sociétés, qui s’accompagne d’une stagnation profonde d’une part, et l’approfondissement de la polarisation mondiale d’autre part. Bien que la défense de la croissance économique ne soit pas notre objectif, il faut savoir que la survie du capitalisme est impossible sans croissance. Les inégalités avec stagnation, ça devient insupportable. L’inégalité est supportable quand il y a croissance et que tout le monde en bénéficie, même si cela est de manière inégale. Comme pendant les 30 glorieuses. Il y a alors inégalité mais sans paupérisation. Par contre, l’inégalité dans la stagnation s’accompagne nécessairement de la paupérisation, et ça devient socialement inacceptable. Pourquoi en sommes-nous venus là ? Ma thèse est que nous sommes entrés dans une nouvelle étape du capitalisme des monopoles, que je qualifie de celle des « monopoles généralisés », caractérisée par la réduction de toutes les activités économiques au statut de facto de la sous-traitance au bénéfice de la croissance exclusive de la rente des monopoles.

    Comment évaluez-vous les réponses actuelles à la crise de la part des pays et des différents mouvements ?

    Avant tout, j’aimerais rappeler que tous les discours des économistes conventionnels et les propositions qu’ils avancent pour sortir de la crise, n’ont aucune valeur scientifique. Le système ne sortira pas de cette crise. Il va vivre, ou essayer de survivre, au prix de destructions grandissantes dans la crise permanente. Les réponses à cette crise sont jusqu’à présent, pour le moins qu’on puisse dire, limitées, douteuses et inefficaces dans les pays du Nord.

    p12_samir_amin__800_x_800__0

       Samir Amin

    Mais il y a des réponses plus ou moins positives dans le Sud qui s’expriment par ce qu’on appelle «  l’émergence ». La question qui se pose alors est : émergence de quoi ? Emergence de nouveaux marchés dans ce système en crise contrôlé par les monopoles de la triade (des impérialismes traditionnels, de la triade Etats Unis, Europe occidentale et Japon) ou émergence des sociétés ? Le seul cas d’émergence positive dans ce sens est celui de la Chine qui tente d’associer son projet d’émergence nationale et sociale à la poursuite de son intégration dans la mondialisation, sans renoncer à exercer son contrôle sur les conditions de cette dernière. C’est la raison pour laquelle la Chine est probablement l’adversaire potentiel majeur de la triade impérialiste. Mais il y a aussi les semi-émergents, c’est-à-dire ceux qui aimeraient l’être mais qui ne le sont pas véritablement, comme l’Inde ou le Brésil (même au temps de Lula et Dilma). Des pays qui n’ont rien changé aux structures de leur intégration dans le système mondial, demeurent réduits au statut d’exportateurs de matières premières et des produits de l’agriculture capitaliste. Ils sont bien « émergents », dans le sens qu’ils enregistrent parfois des taux de croissance pas trop mauvais accompagnés par une croissance plus rapide des classes moyennes. Ici l’émergence est celle des marchés, pas des sociétés. Et puis, il y a les autres pays du Sud, les plus fragiles, et notamment les pays africains, arabes, musulmans, et ici et là d’autres en Amérique latine et en Asie. Un Sud soumis à un double pillage : celui de leurs ressources naturelles au profit des monopoles de la Triade, celui des raids financiers pour voler les épargnes nationales. Le cas argentin est à cet égard emblématique. Les réponses dans ces pays sont souvent malheureusement « pré-modernes » et non « post-modernes » comme on les présente : retour imaginaire au passé, proposé par les islamistes ou par des confréries chrétiennes évangélistes en Afrique et en Amérique latine. Ou encore des réponses pseudo-ethniques qui insistent sur l’authenticité ethnique de pseudo-communautés. Des réponses qui sont manipulables et souvent efficacement manipulées, bien qu’elles disposent de bases sociales locales réelles (ce ne sont pas les États-Unis qui ont inventé l’islam, ou les ethnies). Néanmoins, le problème est sérieux, parce que ces mouvements disposent de grands moyens (financiers, médiatiques, politiques, etc.) mis à leur disposition par les puissances capitalistes dominantes et leurs amis locaux.

    Quelles réponses pourrait-on imaginer, de la part des mouvements de la gauche radicale aux défis posés par ce capitalisme dangereusement moribond?

    Une des tentations, que je vais écarter tout de suite, est que face à une crise du capitalisme global, la réponse recherchée doit elle aussi être globale. Tentation très dangereuse parce qu’elle inspire des stratégies condamnées à l’échec certain : «la révolution mondiale », ou la transformation du système mondial par en haut, par décision collective de tous les Etats. Les changements dans l’histoire ne se sont jamais fait de cette manière. Ils sont toujours partis de celles des nations qui constituent des maillons faibles dans le système global ;des avancées inégales d’un pays à l’autre, d’un moment à l’autre. La déconstruction s’impose avant la reconstruction. Cela vaut pour l’Europe par exemple : déconstruction du système européen si on veut en reconstruire ultérieurement un autre, sur d’autres bases. Il faut sortir de l’illusion de la possibilité de « réformes » conduites avec succès à l’intérieur d’un modèle qui a été construit en béton armé pour ne pouvoir être autre chose que ce qu’il est. La même chose pour la mondialisation néolibérale. La déconstruction, qui s’appelle ici déconnexion, n’est certes pas un remède magique et absolu, qui impliquerait l’autarcie et la migration hors de la planète. La déconnexion appelle au renversement des termes de l’équation ; au lieu d’accepter de s’ajuster unilatéralement aux exigences de la mondialisation, on tente d’obliger la mondialisation à s’ajuster aux exigences du développement local. Mais attention, dans ce sens, la déconnexion n’est jamais parfaite. Le succès sera glorieux si on réalise seulement quelques-unes parmi nos revendications majeures. Et cela pose une question fondamentale : celle de la souveraineté. C’est un concept fondamental que nous devons nous réapproprier.

    De quelle souveraineté parlez vous ? Croyez vous dans la possibilité de construire une souveraineté populaire et progressiste, en opposition à la souveraineté telle que conçue par les élites capitalistes et nationalistes ?

    La souveraineté de qui ? Voilà la question. Nous avons été habitués par l’histoire à connaître ce qui a été appelé comme la souveraineté nationale, celle mise en œuvre par les bourgeoisies des pays capitalistes, par les classes dirigeantes pour légitimer leur exploitation, d’abord de leurs propres travailleurs, mais aussi afin de renforcer leur position dans la compétition avec les autres nationalismes impérialistes. C’est le nationalisme bourgeois. Les pays de la triade impérialiste n’ont jamais connu jusqu’à présent un nationalisme autre que celui-ci. Par contre, dans les périphéries nous avons connu d’autres nationalismes, procédant de la volonté d’affirmer une souveraineté anti-impérialiste, opérant contre la logique de la mondialisation impérialiste du moment.

    La confusion entre ces deux concepts de « nationalisme » est très forte en Europe. Pourquoi ? Et bien, pour des raisons historiques évidentes. Les nationalismes impérialistes ont été à l’origine des deux guerres mondiales, source de ravages sans précédents. On comprend que ces nationalismes soient ressentis comme nauséabonds. Après la guerre, la construction européenne a laissé croire qu’elle allait permettre de dépasser ce genre de rivalités, par la mise en place d’un pouvoir supranational européen, démocratique et progressiste. Les peuples ont cru à cela, ce qui explique la popularité du projet européen, qui tient toujours en dépit de tous ses ravages. Comme en Grèce par exemple, où les électeurs se sont prononcé contre l’austérité mais en même temps ont conservé leur illusion d’une autre Europe possible.

    Nous parlons d’une autre souveraineté. Une souveraineté populaire, par opposition à la souveraineté nationaliste bourgeoise des classes dirigeantes. Une souveraineté conçue comme le véhicule d’une libération, faisant reculer la mondialisation impérialiste contemporaine. Un nationalisme anti-impérialiste donc, qui rien à voir avec le discours démagogique d’un nationalisme local qui accepterait d’inscrire les perspectives du pays concerné dans la mondialisation en place, qui considère le voisin plus faible comme son ennemi.

    Comment se construit-il donc un projet de souveraineté populaire ?

    Ce débat nous l’avons conduit à différentes reprises. Un débat difficile et complexe compte tenu de la variété des situations concrètes. Avec, je crois, de bons résultats, notamment dans nos discussions organisées en Chine, en Russie, en Amérique latine (Venezuela, Bolivie, Équateur, Brésil). D’autres débats ont été encore plus difficiles, notamment ceux organisés dans les pays les plus fragiles.

    La souveraineté populaire n’est pas simple à imaginer, parce qu’elle est traversée de contradictions. La souveraineté populaire se donne l’objectif du transfert d’un maximum de pouvoirs réels aux classes populaires. Celles-ci peuvent s’en saisir à des niveaux locaux, pouvant entrer en conflit avec la nécessité d’une stratégie au niveau de l’État. Pourquoi parler de l’État ? Parce qu’on le veuille ou pas, on continuera à vivre pas mal de temps avec des États. Et l’État reste le lieu majeur de la décision qui pèse. Ici se situe le fond du débat. À l’un des extrêmes de l’éventail dans le débat, nous avons les libertaires qui disent que l’État c’est l’ennemi qu’il faut à tout prix combattre, qu’il faut donc agir en dehors de sa sphère d’influence ; à l’autre pôle nous avons les expériences nationales populaires, notamment celles de la première vague de l’éveil des pays du sud, avec les nationalismes anti-impérialistes de Nasser, Lumumba, Modibo, etc. Ces leaders ont exercé une véritable tutelle sur leurs peuples, et pensé que le changement ne peut venir que d’en haut. Ces deux courants doivent dialoguer, se comprendre afin de bâtir des stratégies populaires qui permettent d’authentiques avancées.

    Qu’est-ce qu’on peut apprendre de ceux qui ont pu aller plus loin ? Comme en Chine ou en Amérique latine ? Quelles sont les marges que ces expériences ont su mettre à profit? Quelles sont les forces sociales qui sont ou pourraient être favorables à ces stratégies ? Par quels moyens politiques pouvons-nous espérer mobiliser leurs capacités ? Voilà les questions fondamentales que nous, les mouvements sociaux, les mouvements de la gauche radicale, les militants anti-impérialistes et anti-capitalistes, nous devons nous poser et auxquelles il nous faut répondre afin de construire notre propre souveraineté, populaire, progressiste et internationaliste.

    Source : Investig’Action

    Lien permanent Catégories : Europe, Extrêmisme, Gouvernement 0 commentaire
  • VIDEO : La dette grecque, une tragédie européenne


     

    Cette vidéo se propose de résumer, de la manière la plus simple et légère possible, le processus d’endettement de la Grèce qui l’a menée jusqu’à sa crise de la dette publique à partir de 2010. Elle permet aussi de dénoncer, avec de nombreux arguments à l’appui, la désinformation massive qui a été faite à ce sujet.

    Les informations contenues dans cette vidéo sont issues du rapport de la Commission pour la vérité sur la dette grecque. Elle permet à un public plus large d’aborder les conclusions du rapport.

    D’autres articles et vidéos traitant du sujet :
    Si la Grèce respire, c’est toute l’Europe qui ira mieux
    Quelques vérités sur la dette grecque

    Lien permanent Catégories : Euro, Europe, Grèce 0 commentaire
  • Stop TAFTA c’est STOP UE : la Commission Européenne poursuit les négociations à marche forcée !

    www.initiative-communiste.fr

    A l’approche des élections, changement de posture du gouvernement français. Alors que Hollande a soutenu de façon continue les négociations pour un traité de libre USA/UE lancée sous mandat exclusif et secret de la Commission Européenne pour instituer un , son secrétaire d’état au Commerce, Matthias Fekl a annoncé mardi 30 aout que la France demanderai l’arrêt des négociation.

    «La France considère que nous sommes à un moment de vérité et de décision. À la fin du mois de septembre (lors d’une réunion des ministres chargés du commerce extérieur à Bratislava, ndlr), je demanderai au nom de la France l’arrêt des négociations sur le »,Ce que demande la France, c’est l’arrêt pur, simple et définitif des négociations. Elles ont créé partout des peurs. Elles doivent maintenant se terminer (…) Il faut un coup d’arrêt clair, net, pour reprendre les discussions sur de bonnes bases. Nous verrons si d’autres nous emboitent le pas».«La France ne soutient plus ces négociations. La Commission a été très offensive mais les Américains ne donnent rien ou alors des miettes. Ce n’est pas comme ça qu’il faut négocier»

    Définitivement c’est STOP UE

     Cette annonce hypocrite n’interrompt cependant pas le processus d’adoption de ce traité  : en la matière c’est la Commission Européenne qui décide. C’est elle qui détient le mandat de négociation exclusif et le gouvernement français n’a pas son mot à dire. Et même Fekl admet son impuissance :

    «La Commission européenne a parfaitement la possibilité de négocier et personne ne peut juridiquement s’y opposer. Mais il n’y a plus de soutien politique de la France à ces négociations»

    De fait, le porte-parole de la Commission européenne, Margaritis Schinas n’a pas manqué de renvoyer Fekl a ses moutons  : «Nous avons un mandat de négociation qui a été accepté unanimement» lors du dernier sommet européen cet été, a-t-il dit.

    Rappelons que la Commission Européenne a obtenu l’unanimité des gouvernements des pays membres pour ce mandat de négociation

    Et en fait les négociations avancent vite et la Commission Européenne annonce déjà le début du processus de ratification du traité pour la fin de l’année

    «Si les conditions sont remplies, la Commission européenne est prête à boucler l’accord à la fin de l’année»  Margaritis Schinas Commission Européenne

    Selon son porte-parole, cette dernière «fait des progrès constants dans les négociations en cours sur le TTIP». Elles sont même entrées dans «une phase cruciale», avec des propositions sur tous les chapitres. Ce que confirme le chef des négociateurs américain Michael Forman. «En réalité, les négociations progressent», explique-t-il au Spiegel au moment même des déclarations de Fekl.

    L’exemple dramatique du TAFTA dont on sait ce que seront ses conséquences catastrophiques dans de large domaine (santé publique, protection sanitaire, agriculture, emplois et production industrielle et technologique, démocratie …) le démontre une nouvelle fois : pour que ce soient les peuples qui décident et pas la dictature de l’oligarchie capitaliste, c’est un impératif démocratique urgent que de sortir de l’Union Européenne. De briser les chaines de l’UE et d’en sortir pour s’en sortir comme l’expliquent à raison depuis des années les militants franchement communistes du PRCF.

    Hypocrisie : le grand marché transatlantique existe déjà

     On ne manquera pas de souligner l’hypocrise de Fekl et du gouvernement : faisant d’un coté mine de vouloir interrompre des négociations sur lesquelles ils ont décidé de ne pas avoir main, et de l’autre signant un traité de libre échange avec le Canada en tout point similaire au TAFTA instituant déjà de fait un grand marché transatlantique au moins avec les milliers de multinationales américaines déjà implantées de l’autre coté de l’Ontario.

    Pour tonitruantes qu’elles soient, ces déclarations ne doivent donc être vue que comme de la com’. De la com’ pré-electorale. D’une part, pour stopper l’adoption du TAFTA la seule solution c’est de stopper l’UE. De sortir de cette dictature du totalitarisme capitaliste pour que ce soit les peuples qui décident. D’autre part, Fekl et le gouvernement PS s’ils éructent sur l’interruption des négociations ne se positionnent pas sur un refus d’un grand marché transatlantique.«La France ne soutient plus ces négociations. La Commission a été très offensive mais les Américains ne donnent rien ou alors des miettes. Ce n’est pas comme ça qu’il faut négocier»C’est en fait la même musique que celle déjà entendue des milliers de fois lorsque le peuple rejettent massivement des décisions catastrophiques pour lui que lui impose la dictature du Capital. Ici en en réclamant une « autre négociation », là en tentant de berner les travailleurs avec les slogants pour « une autre  ». Demain, ils nous parlerons d’un « Grand marché Transatlantique Social ».

    JBC pour www.initiative-communiste.fr

    Lien permanent Catégories : Économie, Europe, Monde 0 commentaire