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  • Birmanie: l’honneur perdu d’Aung San Suu Kyi

     

     

    Hier icône révérée de la démocratie et des droits de l’homme, le prix Nobel de la paix 1991 partage désormais le pouvoir avec ses anciens geôliers militaires. Elle est inactive et silencieuse, au nom de la raison d’État et de la solidarité avec la majorité bouddhiste, face aux violences qu’inflige l’armée à la minorité musulmane des Rohingya.


    L’exercice du pouvoir peut être un révélateur cruel pour les anciens opposants devenus dirigeants, même – et peut-être surtout – s’ils ont été l’objet d’un véritable culte. Aung San Suu Kyi, lauréate en 1991 du prix Nobel de la paix pour « son engagement en faveur de la démocratie et des droits de l’homme » en Birmanie, est accusée, un quart de siècle plus tard, par onze autres « Nobel de la paix » et une douzaine de personnalités internationales de passivité, sinon de complicité par le silence et l’inaction dans « la tragédie humaine, le nettoyage ethnique et les crimes contre l’humanité » dont est victime l’ethnie musulmane rohingya, dans le nord-ouest du pays.

    Dans une lettre au président du Conseil de sécurité des Nations unies, datée du 29 décembre 2016, où elles demandent à l’ONU d’inscrire d’urgence cette crise à l’ordre du jour de ses travaux, ces personnalités reprochent à Aung San Suu Kyi, qui exerce aujourd’hui de facto les fonctions de premier ministre, de n’avoir pris, malgré leurs « appels répétés », « aucune initiative pour défendre les droits des Rohingya en leur assurant la citoyenneté ». « Mme Aung San Suu Kyi, soulignent-ils, est la dirigeante, elle a la responsabilité primordiale de diriger et de le faire avec courage, humanité et compassion. »

    « Courage, humanité et compassion. » C’étaient les qualités mêmes que ses visiteurs et le comité Nobel reconnaissaient à la « Dame de Rangoon » pendant ses quelque trente années de lutte inlassable pour la démocratie, lutte à laquelle elle a sacrifié sa liberté, sa santé et jusqu’à sa famille. Pourquoi l’icône révérée, inflexible au point de résister à quinze ans d’assignation à résidence dans sa vieille demeure décrépie, se révèle-t-elle au pouvoir incapable de fidélité à ses idéaux démocratiques et à ses engagements de dissidente ?

    La Birmanie, expliquent ses fidèles, n’est pas encore, malgré le triomphe de la Ligue nationale pour la démocratie aux élections de novembre 2015, en situation de démocratie, mais en phase de transition. Certes, la LND contrôle les deux chambres du Parlement. Aung San Suu Kyi est à la fois ministre des affaires étrangères et conseiller de l’État – c’est-à-dire premier ministre de fait. Mais l’armée détient toujours, en application de la constitution de 2008, 25 % des sièges des deux chambres, ainsi que les ministères de la défense, de l’intérieur et des frontières. Elle contrôle aussi – modeste copie du système indonésien – quelques entreprises industrielles, autrefois étatisées.

    Ces atouts, décrits par un diplomate comme un « bunker constitutionnel », conjugués à ses effectifs démesurés – près de 500 000 hommes, renforcés par plus de 50 000 miliciens – et à une activité anti-insurrectionnelle incessante face aux rebellions persistantes de certaines minorités ethniques, donnent à son chef d’état-major, le général Min Aung Hlaing, un poids politique énorme. Ce qui ne laisse à Aung San Suu Kyi qu’une marge d’initiative modeste. Dont elle n’abuse d’ailleurs pas, hantée par la crainte d’ouvrir avec les militaires une crise qui mettrait en péril le processus de démocratisation du pays.

    Même si elle peut être entendue, cette argumentation des partisans de « la Dame » n’explique pas tout. Et surtout, elle ne justifie en rien la poursuite d’une discrimination et d’une pratique de moins en moins inavouée de nettoyage ethnique à l’encontre des Rohingya. Politique qui a commencé bien avant la dictature militaire, à l’époque de la colonisation britannique, et qui a été endossée par tous les régimes successifs. Y compris hélas par l’actuel, c’est-à-dire le premier issu d’élections libres.

    Originaires dit-on de Perse, de Turquie, d’Arabie ou des confins musulmans du sous-continent indien – l’ostracisme qui les frappe n’a pas facilité les recherches sur leurs origines –, ceux qu’on appelle aujourd’hui les Rohingya sont arrivés du Bengale oriental au début du XIXe siècle, poussés par les Britanniques qui cherchaient à s’en débarrasser vers l’Arakan, au nord-ouest de l’actuelle Birmanie.

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  • Plaidoyer pour une 6e République française

     

     

    4.624.511 citoyens seulement ont voté « Non » au projet de Constitution de 1958, dont le jeune assistant des Facultés de Droit que j’étais. En octobre 1962, cette modeste opposition personnelle s’est renforcée à l’occasion de l’instauration de l’élection du chef de l’État au suffrage universel, mais elle s’est trouvée noyée dans le flot plébiscitaire indifférent à la violation de la procédure de révision d’une Constitution adoptée quatre ans plus tôt.

     

    Pas d’observation critique à ce propos chez les plus éminents Constitutionnalistes. M. Prélot, qui avait vu dans la Constitution de 1958 « d’abord un Sénat », « glisse » sur le problème, dans son Précis Dalloz de 1963 ; P. Lampué à la R.D.P de septembre-octobre 1962 soutient l’usage de l’article 11 en lieu et place de l’article 89.

    Comme le Conseil d’État et le Conseil Constitutionnel, M. Duverger, lui-mêle, rappelle seulement que certains « ont estimé cette procédure inconstitutionnelle» (10° édition de son Thémis. 1968). Quelques-uns ont contesté dans la presse l’initiative gaulliste (P. Bastid, G. Berlia, G. Burdeau, P.M. Teitgen). Toutefois, le terme de « violation » de la légalité constitutionnelle a été en général évité : le « charme discret » des milieux juridiques n’apprécie guère les anathèmes.

    En bref, avec le temps, il s’avère que la V° République n’a été qu’à peine égratignée par les coups de force qui ont présidé sa naissance et ses débuts. Car en définitive, malgré le rôle de l’armée en Algérie visant à « sauver l’Algérie française » et la révision de 1962 imposé aux forceps, ni les juristes ni les partis politiques n’ont condamné radicalement ce « 6 février qui a réussi », selon la formule d’A. Siegfrid1.

    Enfin, la « stabilité des institutions », considérée comme une vertu en soi, était assurée ; le « rôle des partis », analysé comme nocif par nature, était réduit2. Rapidement, chacun a fait assaut de « parlementarisme rationalisé » ou approuvait « le renforcement de l’exécutif… devenu une nécessité ».

    Le « droit constitutionnel nouveau » était arrivé sur le marché des juristes. Il était apprécié puisqu’il devait renforcer le rôle de « l’état de droit ». D’ailleurs, s’il y avait eu « accord général sur les grands principes… c’est qu’en fin de compte le nouveau régime était « bien adapté au génie politique de notre peuple »3.

    En définitive, dans le petit monde des Facultés de Droit, la tâche originelle s’est vite effacée et tous se retrouvaient, comme après chaque changement de régime, dans le meilleur des mondes. Le régime de Vichy avait déjà reçu le soutien explicite ou implicite de nombreux professeurs de droit et nul n’a rappelé en 1958-1962 les dispositions du projet mort-né de Constitution pétainiste du 30 juin 1944, concocté par le professeur Joseph Barthélémy, libéral vivement hostile au Front Populaire accusé d’avoir « copié le régime soviétique de Staline » 4 !

    La proximité évidente de ce projet de 1944 et de la Constitution de 1958 ne semble pas avoir alerté les constitutionnalistes les plus éminents. En réalité, si on en était arrivé là en 1958 c’était parce que « la France n’était pas parvenue à dégager une solution définitive à la question de l’aménagement des pouvoirs »5, comme si la V° République ne pouvait qu’être d’une qualité supérieure puisqu’elle succédait à quatre Républiques qui n’étaient que des brouillons insatisfaisants d’une République à la recherche d’elle-même !

    Mieux, la Constitution de 1958 réussissait une « révolution copernicienne »6 : le rigorisme juridique de certains quant à la procédure de révision choisie en 1962 (celle qualifiée de « normale » (article 89) et celle simplement « concurrente » (article 11) ne pouvait s’opposer au grand « renouveau » inspiré par Michel Debré ! La thèse était adoptée selon laquelle le référendum de 1962 avait « purgé le vice qui était de nature à entacher » la V° République. Pour nombre de juristes, c’était seulement la preuve que la Constitution était « vivante » !

    Cette indulgence, mâtinée d’un conservatisme indifférent, manifestée par les universitaires constitutionnalistes, s’est accompagnée (comme il est de coutume) dans les manuels les plus fréquentés d’une analyse sur quelques systèmes étrangers auxquels on faisait l’honneur de s’intéresser (selon des critères incertains).

    Les concernant, cette analyse était d’une nature différente selon qu’il s’agissait d’État s’inscrivant dans la mouvance occidentale (de forme juridique) ou d’État appartenant à un « autre » monde (de nature politiste). Rare originalité, l’un de ces manuels consacrait quelques lignes à l’Inde, cette « plus grande démocratie du monde », comme le répètent les journalistes. C’est que cet État a un mérite incomparable : il a copié le système britannique et doit se confronter avec la Chine voisine et « menaçante ». De surcroît, après l’effondrement de l’URSS, l’Inde ex-leader du Mouvement des Non Alignés, avait changé de cap et se rapprochait des États-Unis.

    Mais l’évaluation positive du système indien occultait ce qui bouscule les institutions, c’est-à-dire les luttes confessionnelles, le nationalisme islamophobe régnant depuis 1990. Toutes les vertus de la démocratie indienne se concentrent sur les élections grâce auxquelles l’occidentalisme pardonne tout. Peu importe si « les habitudes de vote sont étroitement liées aux problèmes locaux et à des questions de castes et de communauté qui varient d’un isoloir à l’autre », comme l’écrit Arundhati Roy7.

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  • Michel Collon teste les médias: Trump, un monstre pour l'establishment ?

    Le monde  entier ne parle que de ça : Trump est-il une rupture, un monstre pour l'élite des Etats-Unis ? Pourquoi celle-ci se divise-t-elle entre deux stratégies ? Aurons-nous autant de guerres avec lui ? Quel penseur inspire sa stratégie ? Le bilan d'Obama est-il vraiment si "positif" ? Et les médias nous aident-ils à comprendre tout cela ?

    Michel Collon a disparu des écrans télé. Il dérange. Alors, Investig'Action a décidé de démarrer une nouvelle émission vidéo. Chaque mois « Michel Collon teste les médias » vous aidera à décrypter le plus important de l'actualité. Dans ce monde de plus en plus complexe, dangereux et menteur, l'info n'est certainement pas un luxe, mais un droit !

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    Parce qu’on ne peut laisser des médias dominés par la logique marchande monopoliser l’information sur les guerres, l’économie et les rapports Nord-Sud, Investig’Action milite pour donner la parole aux sans-voix.

    Trump, un monstre pour l'establishment ?

    Michel Collon teste les médias

     

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  • Epilogue : Un accord entre Congolais

     

    Finalement le samedi soir, 31 décembre, vers 22h et quelques minutes, un accord a été signé. Bref aperçu et quelques réflexions en 4 questions et réponses.

     

    1. Que contient l’Accord?

     

    • Comme dans l’Accord du 18 octobre et l’accord de “95%” du 24 décembre, il n’y aura pas de tentative de changer la constitution et de rendre possible un troisième mandat pour le président Kabila.
    • Les élections auront lieu fin décembre et le président Kabila restera en fonction jusqu’au transfert du pouvoir au nouveau président élu.
    • Le gouvernement sera recomposé ainsi qu’il suit : un Premier ministre venant du Rassemblement. 21 ministres pour le Rassemblement, 19 ministres pour l’opposition signataire de l’Accord du 18 octobre et le parti de Bemba, le MLC. Le reste des ministres, autour de 25, iront à la Majorité Présidentielle actuelle autour du président Kabila.
    • Il y aura une commission de suivi de l’Accord et du processus électoral de 28 personnes, dirigée par Etienne Tshisekedi.
    • Des 7 personnes emblématiques pour lesquelles le Rassemblement demandait la libération ou la levée de la mise en accusation, 4 sont libérés ou mis hors accusation. Les trois cas restants seront traités par la CENCO. (Katumbi, Muyambo et Diomi Ndongala).

     

    Il reste encore deux sujets à éclaircir :

    Au niveau des signataires : Le MLC de Bemba qui restait récalcitrant à signer a quand même signé. Mais une partie de l’opposition qui avait signé l’accord du 18 octobre (sauf l’UNC de Kamerhe) refuse de signer. Il s’agit de Badibanga, actuel premier ministre et dirigeant des parlementaires de l’UDPS. Et encore quelques autres signataires.

    De deux : l’Accord devra être suivi d’un « arrangement particulier » qui sera annexé à l’Accord comme faisant partie intégrante. Cet arrangement devra spécifier l’interprétation des « prérogatives du Premier ministre prévues par la Constitution », ainsi que la composition définitive du gouvernement.

     

    Ces deux sujets seront résolus avant le 12 janvier 2017.

    1. Quelle est la signification de l’accord ?
    • D’abord et avant tout : cet accord a été un accord conclu entre Congolais, sans implication de diplomates ou experts occidentaux. Aussi bien Tshisekedi que Lambert Mende, ont mis cela en avant après la signature de l’accord. [1]
    • Cela signifie l’échec de la stratégie de renverser le président Kabila après le 19 décembre, stratégie appuyée par Washington et Bruxelles.
    • Cela implique aussi que l’alliance autour de Kabila aura des chances égales à celles de l’opposition de participer aux élections, de les gagner ou de jouer un rôle d’opposition en cas de défaite électorale.
    • Le fait que Kabila lui-même ne sera pas candidat, obligera cette alliance à s’unir ou à former une nouvelle alliance autour d’un autre candidat qui voudrait continuer la ligne Lumumbiste de défense de l’unité, l’intégrité territoriale et de la souveraineté du pays, ainsi que la poursuite du progrès et du bienêtre de la population. On peut ici espérer que cette fois-ci cette alliance aura un projet de société et une base politique en commun, plutôt que l’unité autour d’une personne, comme c’était le cas avec la MP depuis 2006.
    • L’argument de méfiance et le procès d’intention contre Kabila qui voudrait faire tout pour s’accrocher au pouvoir est maintenant dépassé. Ce qui signifie qu’un débat politique normal autour des programmes politiques et des visions différentes pour le futur de la RDC devient possible.
    • Le caractère inclusif de l’accord rend possible que les élections sérieuses, pourront avoir lieu dans une atmosphère sereine.

     

    1. Que peut menacer l’application de cet accord ?

    Il est clair que les ingérences et la guerre psychologique menée à partir de l’extérieur continueront à essayer de diviser les Congolais et à faire un focus sur le procès d’intention de Kabila.

    • Exemple, le 30 décembre 2016, vers 23h, La Libre Belgique publie un article disant que le Président Kabila aurait répondu aux évêques qu’il refusait le dialogue et qu’il aurait dit vouloir organiser un référendum pour pouvoir briguer un troisième mandat. Or le jour suivant, les discussions continuent et le soir l’accord est signé. Il est important de noter que tous les sites de l’opposition congolaise avaient repris la nouvelle quelques heures après.
    • On peut donc s’attendre qu’à chaque problème qui suit, la faute sera immédiatement imputée au président Kabila et sa MP par des experts du type Stearns, Cohen et Cie et par le milieu des diplomates occidentaux, sans oublier les médias qui reprennent leur interprétation des faits.

     

    Le problème principal à résoudre pour l’organisation des élections seront les finances. Se posera d’abord la question de trouver des façons de diminuer le budget des élections actuellement estimé à 1,8 milliards de dollars US. Il y a peut-être des économies à faire sur l’achat de matériel, la masse salariale, etc… Il existe aussi la proposition qui circule au sein de la MP d’organiser les élections présidentielles d’une façon indirecte, comme cela se fait aux Etats-Unis ou lors des élections en 1960 au Congo. Mais sur ce dernier point il faudrait d’abord un consensus au sein de la classe politique et dans la population.

    Enfin la recherche de l’aide financière pour le budget des élections chez les partenaires extérieurs. Là, le danger d’ingérence est grand, car les occidentaux vont conditionner leur aide financière. Ce qui implique le danger des élections sous tutelle extérieure. Il est clair que des élections sous tutelle occidentale devraient impliquer la défaite certaine du courant de ce qu’ils appellent « souverainiste ».

    Enfin, il y a le danger de guerre à l’Est. Une guerre qui pourrait partir au Burundi et qui pourrait traverser la frontière avec la RDC. Ou encore une guerre lancée par Kigali et Kampala avec l’aide de milices ou de mercenaires congolais.

    1. Qu’est-ce qui a rendu possible la signature de cet accord ?

    D’abord au niveau de la RDC, il y a eu le refus de capituler devant les menaces et ingérences des occidentaux. Le déroulement des négociations du 1 septembre jusqu’au 18 octobre et du 11 au 31 décembre, prévoyant encore des négociations jusqu’au 12 janvier, est révélateur. Le rythme de ces négociations  montre que ni les oukases, les deadlines, les menaces et les sanctions de Washington ou Bruxelles n’ont pu empêcher les Congolais de discuter entre eux jusqu’à ce qu’ils tombent sur un Accord qu’ils acceptent de libre volonté.

    Ensuite il y a aussi une évolution importante au niveau international. Les guerres contre la Libye (2011) et contre la Syrie menées directement ou indirectement par les Etats-Unis appuyés par l’Union Européenne ont crée beaucoup de méfiance chez les dirigeants africains envers les vraies intentions des ingérences occidentales dans des conflits qui se déroulent dans des pays d’une grande importance stratégique.

    L’idée de « solutions africaines pour des problèmes africains » a grandit. Ce qui a rendu possible la facilitation menée par l’Union Africaine et l’appui de l’Union Africaine à l’accord du 18 octobre. Et ce qui a fait que le facilitateur désigné par l’UA a, avec succès, mis en échec les manœuvres de Tom Perriello, l’envoyé spécial des Etats-Unis pour la RDC.

    Au Vatican, le pape ne cache pas ses doutes sur les ingérences occidentales. Il a par exemple, contesté publiquement les intentions d’intervention militaire par les Etats-Unis et l’Union Européenne en Syrie en 2013. [2]

    La Commission épiscopale congolaise, la CENCO, avait lancé en novembre 2015 l’idée d’une marche des chrétiens en faisant référence à l’article. En fait, à l’exemple de Mgr Monsengwo, farouche opposant à Kabila, elle se mettait en avant comme le moteur de la stratégie du renversement de Kabila. Or le 5 janvier, Mgr Nicolas Djomo, le président de la conférence épiscopale du Congo, a du écrire une lettre à ses évêques pour annuler cette marche du 16 février : « Le Saint-Siège nous a fermement recommandé de suspendre les initiatives qui peuvent être manipulées pour des fins politiques. »

    Lundi 26 septembre 2016, une semaine après la violence à Kinshasa et Lubumbashi, le pape reçoit le Président Kabila. Il insiste sur la nécessité d’un «dialogue respectueux et inclusif pour la stabilité et la paix dans le pays». Le 19 décembre il parle longuement avec les évêques de la CENCO qui dirigent les négociations. Et l’on ne peut que remarquer le ton neutre que prennent les évêques quand ils font monter la pression sur les négociateurs. Ainsi, le nonce apostolique dira le 31 décembre encore à la correspondante de RFI:si il n’y a pas d’accord, L’Eglise catholique établira les responsabilités de l’échec. Elles sont des 2 côtés« .     

     

    Source: Intal

    Notes:

    [1] https://www.rtbf.be/auvio/detail_rdc-signature-d-un-accord?id=2172644

    [2] http://www.lalibre.be/actu/international/les-europeens-affichent-leur-fermete-face-a-la-syrie-mais-n-approuvent-pas-des-frappes-522afa2835703d8e48d2c4ca

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  • Le problème, ce n’est pas Trump. C’est nous

     

    John Pilger s’amuse de ceux à qui l’élection de Trump arrachent des cris d’orfraie, alors qu’ils étaient silencieux durant ces années où Obama balançait 72 bombes par jour sur les pays les plus pauvres de la planète. Il y a pourtant une ligne droite qui a mené d’Obama à Trump.


     

    Le jour où le président Trump sera inauguré, des milliers d’écrivains aux États-Unis exprimeront leur indignation. « Pour nous guérir et aller de l’avant…, disent les membres de Writers Resist, nous voulons contourner le discours politique direct, à la faveur d’un regard inspiré sur l’avenir et sur la manière dont nous, en tant qu’écrivains, pouvons être une force unificatrice pour la protection de la démocratie ».

     

    Et d’ajouter : « Nous exhortons les organisateurs et les orateurs locaux à éviter d’utiliser les noms de politiciens ou d’adopter la langue “anti” comme point central de leur événement Writers Resist. Il est important de veiller à ce que les organisations à but non lucratif, qui sont interdites de campagne politique, soient mises en confiance pour participer et parrainer ces événements. »

     

    Ainsi, toute véritable protestation doit être évitée, car elle n’est pas exonérée d’impôt.

     

    Comparez ces railleries avec les déclarations du Congrès des écrivains américains, tenu au Carnegie Hall, à New York, en 1935. Et encore deux ans plus tard. C’était des événements électriques, avec des écrivains discutant de comment ils pourraient faire face aux événements menaçants d’Abyssinie, de Chine et d’Espagne. On lisait les télégrammes de Thomas Mann, de C. Day Lewis, d’Upton Sinclair et d’Albert Einstein, reflétant la crainte que le pouvoir grandissait maintenant et qu’il était devenu impossible de discuter de l’art et de la littérature sans politique ni même action politique directe.

     

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  • 1939-1945 Renault dans la collaboration (1e partie)

     

     

    Renault dans la collaboration, c’est une question qui est un peu revenue à l’ordre du jour. Elle a été relancée sur des bases intéressées de court terme, mais elle mérite de l’être sur des bases générales, vu son intérêt pour la connaissance historique.

     

    Louis Renault et les autres dans la conjoncture présente

    Commençons par les circonstances particulières. Vous le savez, il y a quelques années, après y avoir beaucoup réfléchi et l’avoir de longue date préparée, les héritiers de Renault, les petits-enfants de Renault, ont décidé de lancer une grande opération de récupération des pertes de leurs actifs industriels en se retournant contre l’État. Ils ont expliqué que les mesures prises contre Renault de 1944 jusqu’à la nationalisation-confiscation de la Société anonyme des Usines Renault (SAUR) du 16 janvier 1945, étaient des mesures tout à fait injustes à l’égard d’un grand-père quasi résistant, qui avait tout fait pour servir le secteur civil et la population française pendant la guerre ; qu’elles constituaient de pures spoliations et que par conséquent il fallait revenir sur cette iniquité, qui avait été le produit d’une sorte d’alliance contre nature entre De Gaulle et l’abominable Parti Communiste, alliance sur laquelle on était, sur le plan politique, heureusement déjà revenu. Ça a donné lieu pendant plusieurs années – l’opération ayant été lancée en grand depuis 2009 et surtout 2011 – à un déversement médiatique considérable qui a bénéficié de tous les moyens possibles radiophoniques et audiovisuels.

    Il se trouve que je travaillais sur la collaboration économique, ce qui incitait à poser la question de Renault dans le cadre du thème plus général de la collaboration patronale, devenue une sorte de sujet tabou depuis quelques décennies. Or, à la faveur de l’ouverture des archives, j’ai, à partir des années 1980 et surtout 1990, découvert dans les sources originales ce qu’il était impossible de découvrir avant leur ouverture au public : c’est-à-dire jusqu’à quel degré l’industrie française, le capital financier français s’étaient engagés au service du IIIème Reich pendant l’Occupation de la France.

    Les archives s’ouvraient mais, ça tombait mal, l’atmosphère générale se fermait : les classes dirigeantes étaient désormais traitées avec un infini respect, et, logiquement, les historiens académiques étaient devenus beaucoup moins curieux : la curiosité sur « ceux d’en haut » compromettait sérieusement les carrières. Alors même que les archives révélaient les agissements réels du grand patronat pendant la guerre, avait commencé à s’imposer la mise en cause du concept même de Collaboration, définie comme volonté d’entrer dans des relations privilégiées avec le partenaire, l’occupant allemand.

     

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  • Le président « bon » et le président « méchant »

     

     

    Barack Obama fut « santo subito » (« saint immédiatement ») : à peine entré à la Maison Blanche il fut décoré préventivement en 2009 du Prix Nobel de la paix grâce à « ses extraordinaires efforts pour renforcer la diplomatie internationale et la coopération entre les peuples ». Alors que son administration préparait déjà secrètement, par l’intermédiaire de la secrétaire d’Etat Hillary Clinton, la guerre qui deux ans plus tard allait démolir l’état libyen, en s’étendant ensuite à la Syrie et à l’Irak via des groupes terroristes fonctionnels à la stratégie USA/Otan.

     

    Donald Trump est par contre « démon immédiatement », avant même d’entrer à la Maison Blanche. Il se trouve accusé d’avoir usurpé le poste destiné à Hillary Clinton, grâce à une opération maléfique ordonnée par le président russe Poutine. Les «preuves » sont fournies par la Cia, la plus experte en matière d’infiltrations et coups d’état. Il suffit de rappeler ses opérations pour provoquer et conduire les guerres contre le Vietnam, le Cambodge, le Liban, la Somalie, l’Irak, la Yougoslavie, l’Afghanistan, la Libye et la Syrie ; ses coups d’état en Indonésie, Salvador, Brésil, Chili, Argentine, Grèce. Des millions de personnes emprisonnées, torturées et tuées ; des millions déracinées de leurs terres, transformées en réfugiés objet d’une véritable traite des esclaves. Surtout les fillettes et jeunes femmes, soumises en esclavage, violées, contraintes à se prostituer.

    Tout cela devrait être rappelé par les personnes qui, aux USA et en Europe, organisent le 21 janvier la Marche des femmes pour défendre justement cette parité de genre conquise par de dures luttes, continuellement mise en discussion par des positions sexistes comme celles exprimées par Trump. Mais ce n’est pas pour cette raison que Trump est mis en accusation dans une campagne qui constitue un fait nouveau dans la procédure d’alternance à la Maison Blanche : cette fois la partie perdante ne reconnaît pas la légitimité du président néo-élu, mais tente unimpeachment préventif. Trump se trouve présenté comme une sorte de « Manchurian Candidate » qui, infiltré à la Maison Blanche, serait contrôlé par Poutine, ennemi des Etats-Unis.

    Les stratèges néo-cons, artisans de la campagne, essaient de cette façon d’empêcher un changement de cap dans les relations des Etats-Unis avec la Russie, que l’administration Obama a ramenées à un niveau de guerre froide. Trump est un «trader » qui, en continuant à fonder la politique étasunienne sur la force militaire, entend ouvrir une négociation avec la Russie, possiblement aussi pour affaiblir l’alliance de Moscou avec Pékin.

    En Europe ceux qui craignent un relâchement de la tension avec la Russie sont avant tout les dirigeants Otan, qui ont acquis de l’importance avec l’escalade militaire de la nouvelle guerre froide, et les groupes de pouvoir des pays de l’Est -en particulier Ukraine, Pologne et pays baltes- qui misent sur l’hostilité envers la Russie pour avoir un soutien militaire et économique croissant de la part de l’Otan et de l’Ue.

    Dans ce contexte, on ne peut pas taire dans les manifestations du 21 janvier les responsabilités de ceux qui ont transformé l’Europe en première ligne de l’affrontement, y compris nucléaire, avec la Russie.

    Nous devrions manifester non pas comme des sujets étasuniens qui ne veulent pas un président « méchant » et en demandent un « bon », mais pour nous libérer de la sujétion envers les Etats-Unis qui, indépendamment de qui en est le président, exercent leur influence en Europe par l’intermédiaire de l’Otan ; pour sortir de cette alliance de guerre, pour exiger l’enlèvement des armes nucléaires USA de nos pays.

    Nous devrions manifester pour avoir la parole, comme citoyennes et citoyens, dans les choix de politique étrangère qui, indissolublement liés aux choix économiques et politiques internes, déterminent nos conditions de vie et notre avenir.

    Traduit de l’italien par Marie-Ange Patrizio

    Source: Il Manifesto

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