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Monde - Page 16

  • Le Brésil vu par Le Monde

    Le Monde a-t-il ses raisons de choisir la partialité pour aborder la crise politique brésilienne ? Y-a-t-il une raison pour laquelle Le Monde a choisi de ne pas poser de questions, de ne pas aborder de nouveaux angles, et de ne pas écouter de voix en contre-point à la chorale monocorde des médias brésiliens ?

     



    Cher M. Luc Bronner, cher M. Christophe Ayad,

    Brésiliennes à Paris, nous suivons la crise politique que traverse notre pays d’origine à travers la presse française.

    Par ses principes d’indépendance, de liberté et de fiabilité de l’information, Le Monde fait partie des publications étrangères qui nous offrent un souffle d’impartialité du jeu socio-politique brésilien. Peut-être que les néophytes de l’histoire de ce pays l’ignorent, mais le paysage médiatique brésilien reste, comme le résume Reporters sans Frontières, très concentré dans les mains de familles proches d’une classe politique corrompue. Il n’y a pas dans notre presse de diversités de voix comme on en trouve en France de façon si radicale par exemple entre Le Figaro et L’Humanité.

    La publication des publicités pro-impeachment de la présidente Dilma Roussef payés par la Fiesp — la fédération des industries de São Paulo — dans les versions imprimées et en ligne de Folha de São Paulo, de O Estado de São Paulo et de O Globo démontrent le très peu d’écart entre ce qu’on appelle au Brésil "l’Etat et la Religion", qui se réfère à l’indépendance de la presse. La Fiesp regroupe d’ailleurs ses membres parmi les entreprises pour lesquelles l’évasion fiscale est une donnée familière : en 2015, le montant de la fraude fiscale était de 420 milliards de reais (1) (la corruption est estimée par la même Fiesp à 89 milliards de reais par an) ; le fils du président de la Fiesp, Paulo Skaf, est dans la liste des noms cités dans le Panama Papers.

    C’est parce que nous sommes conscientes de l’impact du Monde sur l’opinion publique et de l’importance du respect de la charte d’éthique et de déontologie du quotidien que nous nous adressons à vous pour vous alerter sur la façon dont le journal relate la plus grave crise socio-politique traversée par le pays depuis 1964.

    Nous sommes sidérées par la présente couverture de votre journal sur le Brésil. Dans ces récits et analyses, il y a un manque de sensibilité, on ne lit aucune multiplicité de sources, ni d’originalité du questionnement, l’approche n’est pas respectueuse de l’ampleur des événements et on ne voit pas l’attention au contexte et à la perspective historique. Bref, il manque Le Monde dans le regard du Monde vers le Brésil.

    Les effets de cette version biaisée, nous les avons ressenti dans nos réseaux parisiens. Abonnés au Monde, architectes, journalistes, professeurs, artistes, réalisateurs, producteurs, chercheurs nous demandent de raisonner sur le "scandale de corruption du PT qui peut destituer Dilma Rousseff et mettre Lula, le président iconique du Brésil, en prison". On dirait qu’ils sont en train de lire Folha de São Paulo, O Estado de São Paulo et O Globo très attentivement. Pour les orienter vers une analyse plus objective et profonde, nous leur recommandons (2) :

    "Brésil, la fin d’une utopie" et "Suicide collectif à Brasília", deux émissions de France Inter, “La crise brésilienne dans une perspective historique”, publié par Autres Brésils, “Brazil is engulfed by ruling class corruption — and a dangerous subversion of democracy”, signé Gleen Greenwald, lauréat du Pulitzer, à The Intercept et finalement “A Coup is in the Air : the plot to unsettle Rousseff, Lula and Brazil", par The Wire.

    Le Monde a-t-il ses raisons de choisir la partialité pour aborder la crise politique brésilienne ? Y-a-t-il une raison pour laquelle Le Monde a choisi de ne pas poser de questions, de ne pas aborder de nouveaux angles, et de ne pas écouter de voix en contre-point à la chorale monocorde des médias brésiliens ?

    Trois articles publiés par Le Monde sont exemplaires dans ce sens :

    1. “Au Brésil, Dilma Rousseff face à des manifestations d’ampleur inédite” (Le Monde, 14 mars).

    L’ensemble des articles sur la manifestation du 13 mars parle des “Brésiliens” comme si 100% de la population était unie autour de la destitution de Dilma Rousseff. Mais qui sont les “Brésiliens vert et jaunes” de la manifestation du 13 mars ? Quel est leur profil socio-économique et leur représentation dans la pyramide sociale du Brésil ? Pourquoi un traitement si différent à propos de la manifestation du 18 mars ? Qui et où sont les Brésiliens de la manifestation du 18 mars ?

    Le quotidien Folha de S.Paulo a choisi un traitement très clair dans ses couvertures sur les deux manifestations : la manifestation du 13 mars a réuni des “Brésiliens vert et jaune” qui sont anti-Dilma et méritent la une (photo à gauche) ; à la manifestation du 18 mars (photo à droite), ce ne sont pas des “Brésiliens”, mais des “pro-Dilma”, des rouges, avec une mise-en-page et un titre beaucoup moins impactant (pour Le Monde, c’est “la foule venue soutenir un Lula humilié et sali”).



    Néanmoins, une recherche a déjà nuancé la diversité de pensées des Brésiliens dans les deux manifestations. Le scénario n’est pas noir et blanc, ou bien jaune et rouge. Le traitement manichéen des "coxinhas" (anti-PT) versus “petralhas” (tous ceux qui ne sont pas anti-gouvernement) a contribué à une vague d’agressions verbales et physiques entre les Brésiliens.

    Les Brésiliens qu’ils soient “jaunes” ou “rouges” sont tous contre la corruption. Cette frustration et cette demande de lutte contre la corruption remonte aux manifestations de 2013, moment historique d’occupation de l’espace public, scène inédite dans le pays après plus de vingt ans. La corruption n’est pas un phénomène nouveau, ni exclusif du gouvernement du PT. Ce qui a changé, c’est que le PT a donné de l’autonomie à la Police fédérale et au Ministère Public (3).

    En 12 ans du gouvernement du PT, la Police fédérale a conduit 2 226 opérations ; à l’époque du président Fernando Henrique Cardoso (PSDB), les enquêtes ne dépassaient pas le nombre de 48. La population ignorait les affaires (et les chiffres) de la corruption au sein du gouvernement : la politique du “abafa” (étouffement) est un fait depuis la dictature militaire, au moins (4).

    2. “Super Moro, le juge qui fait pleurer Lula” (M Le magazine du Monde, 26 mars).

    Collé au profil du “juge médiatique” Marc Trévidic, ce récit, à la mode David contre Goliath, raconte l’histoire du “petit juge de province” contre un ex-président “suspecté de corruption”. Cet “entêté, méthodique et froid” a fait pleurer Lula. Ce "juge justicier" (un parfait exemple d’oxymore ou de contradiction dans les termes), “idole des Brésiliens”, “père de famille qui a fait une partie des ses études a Harvard”, est critiqué “en particulier chez les proches du PT”.

    Au moment de la publication de cette storytelling, les ministres du Tribunal suprême fédéral (STF) du Brésil avaient déjà pointé du doigt les actions de Moro comme arbitraires et politiques. Les méthodes du genre "la fin justifie les moyens" de Moro ne sont jamais remises en question par l’article du Monde. Néanmoins, ce comportement "justicier" de Moro l’a mené devant le STF, qui l’a dessaisi des investigations concernant le cas Lula dans l’opération Lava Jato. Moro a présenté une demande d’excuse au STF pour ses actions. Et si Lula a bien versé des larmes, c’était devant ses partisans, pour parler de ses réussites passées et de ses projets d’avenir. Larmes de crocodile peut-être, quoi qu’il en soit de politicien mais dans un contexte tout autre que celui donné par l’article du Monde qui a fusionné (pour ne pas dire confondu) deux choses différentes.

    3. “Brésil : ceci n’est pas un Coup d’Etat” (Le Monde, 30 mars)

    L’impeachment est prévu et encadré par la Constitution en cas de “crime de responsabilité”. C’est incontestable. Dilma Rousseff est accusée de masquer le budget — cela ne configure pas un crime de responsabilité, un fait répété comme le répètent les ministres du STF. C’est une pratique choquante et à combattre mais c’est aussi une pratique répandue, et courante des représentants du gouvernement.

    La notion de “Coup d’Etat” n’est pas une rhétorique fâcheuse de Rousseff. Le ministre du STF, Marco Aurélio Mello, a déclaré à la presse : “sans un facteur juridique, l’impeachment transparaît comme un coup d’état”. Se joignent à lui des juristes, des professeurs et des avocats : “déguiser une tentative de destitution d’un président a travers une demande d’investigation d’un fait qui ne correspond pas à un crime de responsabilité est une forme contemporaine de Coup d’Etat” (5).

    Deux des journalistes les plus respectés du pays partagent la même opinion. Avec plus de 60 ans de carrière dans la rubrique politique, Janio de Freitas a accompagné les destitutions de trois présidents dans l’Histoire du Brésil. Mario Sergio Conti (6), lui, est l’auteur de “Notícias do Planalto”, enquête publiée en 1999 à propos de la relation entre le pouvoir et les médias pendant le gouvernement de Fernando Collor de Mello. Selon Conti, comparer Rousseff et Collor de Mello, comme le propose Le Monde, est une erreur. Il y avait des preuves de la corruption de Collor. Alors que Rousseff n’est impliquée dans aucun cas de corruption. Le procureur général de la République M. Janot a demandé d’archiver “l’investigation contre Dilma Rousseff dans l’operation Lava Jato”.

    La crise économique et la popularité en baisse de Rousseff ne justifient pas un impeachment. La perte de la majorité dans le Parlement ne doit pas non plus configurer comme une raison pour destituer un président. Cela serait vrai dans un régime parlementaire et pour le Premier ministre. Le Brésil est un régime présidentiel de coalition.

    La destitution est menée par le président de l’Assemblé Nationale, Eduardo Cunha (PMDB), accusé de corruption, blanchiment d’argent et encore un des noms dans le Panama Papers. Parmi les 65 membres de la commission de destitution, 37 sont accusés de corruption ou d’autres crimes. Notamment Paulo Maluf, symbole du politicien corrompu, condamné aussi en France (7).

    Dans le cas d’impeachment, le vice-président, Michel Temer (PMDB), suspecté de corruption, assumerait le poste vacant de président. Le STF a demandé l’analyse de son impeachment (8). Le Monde a interprété les trois minutes pour la prise de décision de la sortie du PMDB de la base Rousseff comme le signe d’un "gouvernement quasi moribond" (9), ignorant que ce n’était là qu’une stratégie politique classique du PMDB, parti le plus néfaste de la vie politique brésilien (à voir l’opinion du gouvernement américain) (10).

    Au contraire du Monde, les brasilianistas des grandes écoles aux Etats-Unis, en France, en Angleterre, ainsi que la secrétaire de la CEPAL (Commission économique de l’ONU pour l’Amérique latine) croient que la démocratie est menacée au Brésil (11). 

    Finalement, la solution magique du Monde pour que le pays puisse “s’attaquer à la crise de croissance et de confiance qu’il traverse comme tant de pays émergent" est la démission de la présidente, afin de mettre le pays dans les mains des mêmes acteurs de toujours. Le PMDB et ses maléfices intrinsèques et ataviques au pouvoir ne peuvent pas représenter une vraie sortie pour les mentalités lucides.

    Plusieurs décisions de l’administration de Rousseff sont sujettes à polémiques : il serait bien de pointer ses erreurs. Il serait pertinent aussi de mettre en question la performance de l’Assemblée Nationale depuis les élections. Pourquoi l’Assemblée n’approuve-t-elle pas les projets concernant l’économie, l’éducation, la santé et même l’aide aux victimes de la tragédie écologique de Mariana ?

    Ces quinze derniers mois, le Congrès le plus conservateur depuis le régime militaire ne s’est occupé que de discuter 55 projets qui proposent, entre autres, de réduire le droit du travail (la loi El Khomri serait considérée comme de l’ultragauche pour les députés et les sénateurs Brésiliens), pénaliser plus sévèrement les femmes et les professionnels de santé qui pratiquent l’IVG, masquer les produits transgéniques au consommateur, réduire la majorité pénale, diminuer le territoire des indiens, réduire les droits des LGBT. La tribune pentecôtiste, dont Eduardo Cunha est le représentant, impose ses restrictions religieuses dans un État qui se bat pour être laïc.

    Le Brésil est une jeune démocratie. Nous avons beaucoup à faire pour avancer, pour développer une économie qui ne dépende pas exclusivement des matières premières, pour évoluer vers une économie verte dans un territoire où la nature est d’une richesse spectaculaire, pour offrir encore les bases en matière d’éducation, de santé et d’infrastructure. Si “le Brésil est un pays d’avenir qui le restera longtemps”, on espère du moins que cet avenir ne sera pas remplacé par un retour vers le passé. Une information de qualité est une des forces pour commencer à écrire une nouvelle histoire. 

    Acceptez nos sincères salutations.

    Stella BIERRENBACH, artiste | Simone ESMANHOTTO, journaliste | Helena ROMANACH, avocate et sociologue | Adriana Ferreira SILVA, journaliste

    Notes :

    1) - economia.estadao.com.br/noticias/geral,sonegacao-de-impostos-no-brasil-chega-a-r-420-bi-em-2015,1784149

    2) - www.franceinter.fr/emission-... et www.franceinter.fr/emission-... et www.autresbresils.net/La-cri... et et theintercept.com/2016/03/18/brazil-is-engulfed-by-ruling-class-corruption-and-a-dangerous-subversion-of-democracy/thewire.in/2016/03/25/a-coup-is-in-the-air-the-plot-to-unsettle-rousseff-lula-and-brazil-25893/

    3) - www.transparency.org/files/c...

    4) - memoriasdaditadura.org.br/corrupcao/

    5) - emporiododireito.com.br/supremo-tribunal-federal-deve-barrar

    6) brasil.elpais.com/brasil/2016/03/31/politica/1459432288_086212.html

    7)- www.latimes.com/world/mexico... et www.monde-diplomatique.fr/20... | www.lemonde.fr/international..., brasil.elpais.com/brasil/2016/03/02/politica/1456926697_853311.html

    8) - www.reuters.com/article/us-b...

    9) - www.lemonde.fr/ameriques/art...

    10) - www.brasilwire.com/pmdb-bras... et wikileaks.org/plusd/cables/04BRASILIA2802_a.html et http://revistapiaui.estadao.com.br/...

    11) - http://www.cienciapolitica.org.br/w... et nacoesunidas.org/cepal-manifesta-preocupacao-diante-de-ameacas-a-democracia-brasileira

    Source : Investig’Action

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  • Violées, elles s’invitent dans la campagne présidentielle à Djibouti et manifestent à Arcueil (94)

    Dix jeunes djiboutiennes sont en grève de la faim à Arcueil, dans la banlieue de Paris. Elles veulent dénoncer l'impunité des soldats violeurs à Djibouti.

     



    Djibouti est une petite dictature de la Corne de l’Afrique, dirigée d’une main de fer par Ismail Omar Guelleh depuis 1999. Un changement de la constitution lui permet de se représenter éternellement et à l’instar d’un Bel Ali (ex dictateur de Tunisie), de bénéficier d’élections présidentielles sans enjeux et pour la forme, il sait qu’il sera réélu ce 8 avril puisqu’il a depuis longtemps fait taire toute opposition dans son pays.

    A l’étranger, il bénéficie des faveurs des grandes puissances. Ce tout petit pays de moins d’un million d’habitants compte un nombre impressionnant de bases étrangères. Sont présentes des bases américaines, françaises, allemandes et japonaises. Il faut dire que Djibouti - à la pointe de la corne de l’Afrique - est un territoire hautement stratégique. Il fait face au Yemen et au Golfe arabique. Il possède aussi le port le plus important de la région et tous les produits importés par la grande Ethiopie voisine transitent par le port de Djibouti.

    L’importance de garder une mainmise absolue sur cette porte de l’Afrique est fondamentale tant pour les Français que pour les Américains, qui ferment donc les yeux sur les dérives dictatoriales de ce président à vie qui leur est favorable.

    Ce petit pays dont on vante la stabilité a pourtant connu une guerre civile de 1991 à 2001 et fait encore face à une opposition armée, celle du FRUD-armé (Front pour la restauration de l’Unité et de la Démocratie).

    Les militaires utilisent le viol comme arme de guerre, comme moyen de domination sur l’opposition au régime et sur les paysannes afars soupçonnées d’être favorables au FRUD.

    Des militantes ont été violées après avoir été arrêtées lors de manifestations. Des jeunes femmes ont été kidnappées sur la route qui menait à leur village. Des femmes ont été abusées en détention, dans la prison de Gabode.

    Aujourd’hui, elles commencent à parler, à sortir du silence imposé par la honte, la famille et la tradition. Elles parlent pour que l’impunité cesse.

    "Il faut que la honte change de camps. Ce n’est pas à nous d’avoir honte, c’est ces militaires violeurs qui devraient avoir honte."

    Fatouma (nom d’emprunt) : "J’étais bergère, je gardais les chèvres, je vivais en brousse. J’ai été violée devant mon père et mon oncle. Mon père était tellement choqué, il a fait une crise et il est mort sur le coup. Je suis en grève de la faim, mais pas pour moi. Je suis reconnue réfugiée en Belgique, je suis en sécurité maintenant. Ce que j’ai subi, je l’ai subi et je dois vivre avec. Je le fais pour les autres, je veux que ça cesse pour toutes les femmes restées au pays. Il faut que les coupables soient jugés."

    Fatoumata est sourde et muette. Elle s’exprime par gestes et une autre gréviste traduit.

    "Je vivais en brousse. Je suis sortie la nuit pour aller chez ma cousine dans le village. Chez nous, il n’y a pas d’électricité, il fait donc très noir. J’ai été prise par les soldats, je ne sais pas crier. Trois soldats de la garde présidentielle m’ont violée, ça les amusait que je sois muette. Mon père a porté plainte, mais ils n’ont jamais fait d’enquête. Je veux que ces monstres soient traduits en justice pour ce qu’ils m’ont fait."

    Fafi : "Il faut arrêter l’impunité. Nous voulons que les coupables, les soldats violeurs, soient traduits en justice. Quand une femme se fait violer, c’est elle qui est considérée comme coupable. Comme si elle l’a cherché. Alors qu’en réalité, face à des soldats armés, tu peux rien faire pour te défendre et comme ces soldats ne sont jamais punis, ils vont toujours recommencer. Il faut que ça cesse. Surtout dans le Nord du pays, les femmes afars sont victimes des militaires. Des femmes se suicident parce qu’elles voient que leurs violeurs continuent de vivre normalement et restent une menace pour elles et les autres femmes. Cette impunité doit cesser. je ne comprends pas le silence de la France, ce pays des droits de l’Homme."

    Zeynaba : "Cette action était notre seul moyen d’interpeller. Beaucoup de femmes ont été violées à Djibouti. Moi j’étais militante à Djibouti Ville, dans le Comité des femmes contre les viols et l’impunité (comité clandestin). On amenait les femmes violées à l’hôpital pour les premiers soins. Notre comité a connaissance d’au moins 300 cas et c’est uniquement les femmes qui sont venues vers nous. Combien sont juste restées silencieuses ? Et les viols continuent. Je suis en France depuis 9 mois, mais je suis encore en contact avec les militantes du comité. Elles nous ont signalé encore un viol, il y a quinze jours."

    Une jeune femme a dû être évacuée pour des raisons de santé. Elle a eu un bébé issu d’un viol par plusieurs militaires. Elle a été complètement rejetée par sa propre famille.

    En osant parler, ces jeunes femmes se sont invitées dans la campagne présidentielle qu’Ismail Omar Guelleh espérait sans surprise. Il a réagi violemment. D’abord il a accusé ces femmes d’être toutes des menteuses. Ensuite il a menacé de poursuivre en justice l’association française "Femmes Solidaires" qui aide les grévistes et qui a mis son local à leur disposition. Sa réaction est claire et montre l’étendue de l’impunité. Il n’envisage même pas la possibilité de mener une enquête.

    Traiter une victime de viol de menteuse, c’est une nouvelle agression, une nouvelle violence qu’elle subit, celle d’être niée dans sa qualité de victime.

    Pourtant la demande des grévistes est simple et légitime : un enregistrement des plaintes pour viol, une enquête transparente et des sanctions contre les coupables. Une tolérance zéro à l’égard des soldats violeurs. En leur refusant cela, Ismail Omar Guelleh fait aveu de culpabilité.

    Source : Investig’Action

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  • Le discours sur les réfugiés syriens : un analyseur

     

    Investig'Action vous invite à lire ou relire cet article de Said Bouamama sur le drame des réfugiés

     

    Dans un article intitulé « Le mur meurtrier de la méditerranée : l’assassinat institutionnel de masse de l’Union Européenne », publié sur ce site le 21 mars dernier, nous mettions en évidence la responsabilité de l’UE dans les milliers de morts chaque année en méditerranée dans des tentatives désespérées de fuir la misère et la guerre. Depuis la publication, le 2 septembre, par la presse turque et britannique de la photo d’un enfant de 3 ans mort sur une plage de Bodrum au sud de la Turquie, une vaste campagne médiatique présente une autre image de l’Union Européenne en général et de la France en particulier. Nous nous serions donc trompés ou un changement radical d’attitude et de politique serait survenu. A moins que nous ne soyons une nouvelle fois devant l’instrumentalisation politique d’un drame humain pour justifier une nouvelle intervention militaire. Les diverses réactions politiques et médiatiques à l’arrivée de ces réfugiés sont par ailleurs un excellent analyseur politique de notre société, de ses politiques et de ses médias.

    Une « cécité » volontaire

    A écouter nos politiques et nos médias, la découverte du corps du petit Aylan aurait mis en évidence l’ampleur du drame vécu par le peuple syrien. Ainsi donc ni les médias et leurs multiples spécialistes et experts, ni les gouvernements européens et leurs services de renseignements n’avaient auparavant mesurés l’ampleur du drame. Aucun ne pouvait imaginer que des enfants étaient victimes des guerres qui déchirent l’Irak et la Syrie. Cet aveu implicite d’une cécité politique et médiatique ne tient pas. Si cécité il y a, elle est volontaire comme en témoigne les sonnettes d’alarme qui ont été soigneusement tues par l’essentiel des grands médias et la majorité de la classe politique. Ainsi par exemple le Haut-Commissariat aux réfugiés (HCR) de l’ONU souligne dans son communiqué de presse du 9 juillet 2015 que nous sommes en présence de « la plus importante population de réfugiés générée par un seul conflit en une génération. Cette population a besoin d’un soutien de la part du reste du monde mais, au lieu de cela, elle vit dans des conditions désastreuses et s’enfonce dans la pauvreté(1). »

    Le même communiqué avance les chiffres suivants : 4 013 000 réfugiés dans les pays voisins de la Syrie (1 805 255 réfugiés syriens en Turquie, 249 726 en Iraq, 629 128 en Jordanie, 132 375 en Egypte, 1 172 753 au Liban et 24 055 en Afrique du Nord) et au moins 7,6 millions de personnes déplacées à l’intérieur de la Syrie. Enfin le communiqué du HCR rappelle le caractère prévisible de l’augmentation du nombre de réfugiés syriens après cinq ans de guerre totale : « Le cap des quatre millions survient à peine 10 mois après que celui des trois millions ait été atteint. Au rythme actuel, le HCR prévoit que le chiffre d’environ 4,27 millions pourrait être atteint d’ici la fin 2015(2). » D’autres données du HCR mettent en exergue la hausse exponentielle du nombre de réfugiés : 92814 en juillet 2012, 1 512 160 en juillet 2013, 2 835 736 en juillet 2014, 4 094 091 en juillet 2015(3).

    Tout le monde savait. Journalistes comme leaders politiques étaient au courant. Les classes dominantes d’Europe et des États-Unis espéraient simplement une nouvelle fois cantonner les réfugiés dans les pays voisins. C’est d’ailleurs ce qu’ils font classiquement pour tous les autres conflits qu’ils suscitent pour le contrôle du gaz, du pétrole et des minerais stratégiques. Ainsi en 2000, les seize millions de réfugiés reconnus par le HCR se répartissent comme suit : « Sur les 16 millions de réfugiés, 3,6 millions se trouvaient en Afrique, 9,1 en Asie, 2,3 en Europe et 0,6 en Amérique du Nord, et le reste en Amérique Latine et en Australie(4). » Terminons avec les données quantitatives en donnant un dernier chiffre du HCR pour l’année 2013 : les pays industrialisés n’accueillent que 14 % de l’ensemble des réfugiés(5).

    Il s’agit clairement de cantonner la misère du monde produite par les politiques économiques des grandes puissances impérialistes d’une part et par les guerres pour le contrôle des matières premières d’autre part, à la périphérie des pays riches. Nous sommes en présence d’une des multiples déclinaisons de l’ultralibéralisme : privatiser les gains et socialiser les pertes et/ou les coûts.

    Les hypocrites reconvertis

    Nous avons assisté dans la semaine qui a suivi la diffusion de la photo du cadavre du petit Aylan à de subites reconversions à l’humanisme. Ainsi par exemple le député de droite des Alpes Maritimes Eric Ciotti écrit sur son compte Twitter dès le 3 septembre : « Image d’horreur insoutenable que celle d’une enfance sacrifiée. Indignation et écœurement face à l’inaction intolérable de la communauté internationale ». Le même estimait il y a à peine un mois, le 10 août, que « l’Union européenne doit engager sans plus attendre des opérations militaires visant à détruire les filières de passeurs à la source et créer des centres de rétention pour migrants dans les pays d’entrée en Europe(6) ».

    Au PS la reconversion est tout aussi radicale. François Hollande annonçait lors du sommet européen extraordinaire sur le drame des migrants en Méditerranée, le 23 avril dernier, son intention de proposer une résolution à l’ONU pour détruire les bateaux des trafiquants. On se demande au passage comment les soldats chargés de cette tâche reconnaîtront les bateaux concernés. Il considère maintenant que l’accueil des réfugiés syriens « C’est le devoir de la France, où le droit d’asile fait partie intégrante de son âme, de sa chair(7)". Après « l’esprit du 11 janvier » nous avons maintenant « l’âme et la chair de de la France ».

    De nombreux médias ont repris ce mythe d’une France qui a toujours été ouverte aux opprimés du monde. S’il est indéniable que des militants et/ou des citoyens ont été accueillis en France dans le passé, il est en revanche mensonger de présenter ce fait comme massif, constant et intégré à « l’âme et la chair » du pays. Nous commençons à avoir l’habitude de ces envolées lyriques visant à écrire un roman national idéologique masquant la réalité historique contradictoire. En janvier 2015 la liberté d’expression était présentée comme une constante française occultant en passant les multiples interdictions des journaux, revues et livres qui s’exprimaient contre la guerre d’Algérie. En 2004 lors du vote de la loi sur le foulard à l’école c’est l’égalité entre les sexes qui est présentée comme une constante française occultant en même temps les inégalités présentes et les combats que les militantes féministes ont dut mener pour diminuer les inégalités réelles.

    Certains médias ont même osé citer l’exemple des républicains espagnols fuyant le fascisme de Franco. Il n’est pas inutile de rappeler les conditions de cet accueil. Voici ce qu’en dit l’historien Marc Ferro :

    Dès 1937, des réfugiés basques affluent, des instructions sont là, qui très vite, oublient les soucis humanitaires des premières semaines. On les fait retourner en Espagne par les Pyrénées orientales. (…). Dès l’automne 1937, Marx Dormoy, ministre de l’intérieur d’un gouvernement Front populaire, demande à la police d’établir un « barrage infranchissable » … Surtout, on montre le peu d’empressement des populations d’accueil à aider les réfugiés, souvent choquées par la passion politique de leurs hôtes(8)

    Plusieurs centaines de milliers de républicains furent « accueillis » dans des camps qu’ils durent eux-même construire. Les familles étaient séparées et les camps étaient entourés de barbelés et surveillés par des gardes mobiles. Les français qui voulaient les aider étaient contraints de jeter nourritures et habits au-dessus des barbelés.

    Il n’y a aucune « âme et chair » française qui comporterait comme caractéristique essentielle l’humanisme et l’accueil des persécutés. Il n’y a également aucune reconversion à propos des réfugiés mais simplement des « reconversions hypocrites » mises en scènes médiatiquement à des fins d’instrumentalisation de l’émotion de l’opinion publique.

    Le discours sur le tri

    A part le Front National qui propose de « ne plus accueillir personne(9) », le consensus sur « l’âme et la chair » de la France réunit désormais la droite et partie importante de la « gauche ». Le second trait du consensus porte sur la nécessité du « tri » entre « réfugiés légitimes » et « réfugiés illégitimes », entre « vrais réfugiés » et « faux réfugiés ». Les propositions fusent et constituent un excellent analyseur de notre société, de sa classe politique et de ses médias lourds.

    Le maire de Roanne, Yves Nicolin propose que le tri se fasse sur une base religieuse :

    Si la France décide d’accueillir sur son sol un certain nombre de familles, et qu’elle décide de les intégrer, c’est-à-dire de leur donner des papiers, et bien la ville de Roanne, je pense, pourra jouer ce rôle-là, accueillir peut-être une dizaine de familles mais à la condition qu’il soit bien question de réfugiés Chrétiens qui sont persécutés parce que Chrétien en Syrie par Daesh (…) Ce que je souhaite c’est qu’on puisse avoir l’absolue certitude que ce ne sont pas des terroristes déguisés. C’est la raison pour laquelle je pense que demander à ce que ce soit des Chrétiens peur représenter une garantie suffisante(10)

    Il est suivi dans cette proposition par Gérard Dézempte maire Charvieu-Chavagneux et par Damien Meslot maire de Belfort. Après l’étoile jaune permettant de distinguer les juifs dans le passé, il faudrait donc faire porter à l’avenir un croissant vert pour éviter les fraudes à l’asile politique. Ces positions sont certes marginales mais suffisent à souligner la banalisation de l’islamophobie en France. Elles indiquent qu’un verrou a sauté en matière d’islamophobie et que celle-ci fait désormais partie de la sphère du « légitime » dans le débat politique.

    Mais le critère de « tri » le plus largement partagé et mentionné est celui de la différence entre « migrants » et « réfugiés ». De nombreux journalistes prennent un ton docte pour nous expliquer cette différence entre les uns qui seraient « économiques » et les autres qui seraient « politiques ». L’accueil des uns serait impossible et exigerait de la fermeté alors que l’accueil des autres serait nécessaire et exigerait de la solidarité. La distinction entre « réfugiés » et « migrants » est même présentée par un journaliste de Libération de la manière suivante :

    La crise humanitaire actuelle est traitée comme une aggravation, certes spectaculaire, mais une simple aggravation d’une « vague migratoire » qui, depuis des années, vient s’échouer sur les côtes européennes, aujourd’hui italiennes et grecques, hier espagnoles. Ce n’est pas un hasard si on parle de « migrants » ou de « clandestins » et non de « réfugiés ». Au fond, pour les Français, Aylan n’est qu’une victime de plus de cette « misère du monde » attirée par l’eldorado européen. Ces masses indifférenciées qui forcent nos frontières au péril de leur vie, et c’est le discours du Front national, ne sont que des « migrants-immigrés » venant au mieux voler le pain des Français, au pire importer le jihad. Le mot « migrant » est un cache-sexe sémantique qui permet de nier la spécificité du drame humain qui se joue à nos frontières, un mot connoté négativement : après tout, dans « immigrant », n’y a-t-il pas « migrant » ? Or, l’immense majorité de ceux qui cherchent à se rendre en Europe n’auraient jamais songé, il y a quelques années, à quitter leur pays : ils ne « migrent » que parce qu’ils fuient la guerre, les massacres, les persécutions, les viols, les tortures, la mort(11).

    Nous partageons le souci de ce journaliste d’une prise de mesure de l’urgence de la situation et de l’ampleur du drame. Cependant cette urgence ne doit pas nous faire oublier la communauté des causes et des responsabilités conduisant à l’émigration dite « économique » et à l’exil politique. Les mêmes puissances de l’OTAN imposent des règles économiques mondiales qui appauvrissent les plus pauvres les contraignant ainsi à l’émigration et interviennent militairement pour le contrôle des matières premières produisant systématiquement des drames humanitaires contraignant à la fuite des millions de personnes : Irak, Afghanistan, Libye, etc. Comme pour les réfugiés, les émigrés dits « économiques » n’auraient jamais songé, il y a quelques années, à quitter leur pays. L’insistance du gouvernement comme de l’opposition sur la distinction entre ces deux catégories de victimes n’a qu’un objectif : justifier le refus de séjour pour les émigrés économiques et même pour les réfugiés ne relevant pas des zones arbitrairement choisies par les pays riches comme étant dangereuses.

    Il est vrai qu’une nouvelle fois les reportages et discours médiatiques ont été centrés sur les conséquences de la situation et non sur les causes. Tout se passe comme si brusquement nous étions en présence d’une tornade imprévisible et non face aux résultats prévisibles des déstabilisations stratégiques dans lesquelles nos gouvernants ont une responsabilité majeure. Le même silence sur les causes aboutit consciemment ou non à masquer la responsabilité des pétromonarchies dans l’offensive de Daesh. Il est vrai que celles-ci sont des amis de l’Europe et des États-Unis. Il conduit consciemment ou non à masquer la responsabilité de la Turquie dans l’offensive de Daesh par la guerre qu’elle mène contre les résistants kurdes. Il est vrai que la Turquie est membre de l’OTAN. Mais le discours médiatique se caractérise également par un autre silence assourdissant : celui concernant le massacre que l’armée Saoudienne et les armées des émirats commettent chaque jour au Yemen contre une révolte populaire. Il est vrai que ce sont « nos » alliés.

    Si les propositions de tri entre réfugiés chrétiens et réfugiés musulmans révèlent l’enracinement de l’islamophobie, celle entre émigrés économiques et réfugiés politiques révèlent la campagne consensuelle (consciente ou non, le résultat est le même) visant à masquer les causes des crises qui secouent notre monde.

    Une logique coloniale

    Le discours sur le tri conduit inévitablement à des propositions de dispositifs. Il est donc proposé à droite comme à gauche de multiplier les centre de tri ou « hotspot ». En bonne logique coloniale, il est proposé d’installer ces nouveaux centres dans les pays méditerranéens et en Afrique même. Il s’agit ni plus ni moins que d’externaliser le « sale boulot » pour qu’il demeure invisible. Le fait que des pays membres de l’Union européenne soient concernés souligne simplement que la logique coloniale s’étend au sein même de l’Europe. La dernière « crise grecque » et son dénouement illustre que ce pays est traité comme le sont les anciennes colonies c’est-à-dire avec la même logique de mise en dépendance et de pillage.
    Ces centres de tri existent déjà comme par exemple à Pozzallo en Italie. Il est géré par Frontex (l’agence européenne en charge des frontières(12)). Le centre de Pozzalo comme les autres sont régulièrement dénoncés par des militants des droits de l’homme comme attentatoires à la dignité des personnes :

    L’objectif ? Enfermer puis renvoyer les "mauvais" réfugiés chez eux, quitte à les maltraiter au passage et parfois les envoyer à la mort dans leurs pays d’origine. Ces prisons qui ne disent pas leur nom voient les policiers y utiliser la force pour obliger les réfugiés à donner leurs empreintes digitales qui sont ensuite enregistrées dans le fichier Eurodac. A Pozzallo, en octobre 2014, des récits, témoignages et enregistrements attestent des violences subies par les réfugiés dans ces centres. Plusieurs centaines de réfugiés avaient entamé une grève de la faim contre les prises d’empreintes forcées. A Pozzallo toujours, en mai 2015, des policiers utilisent des matraques électriques, notamment contre des mineurs qui refusent de donner leurs empreintes. Les policiers emploient également des techniques d’intimidation, les familles se voient menacées d’être séparées(13).
    La proposition de multiplier les « Hotspot » souligne l’absence de volonté d’agir sur les causes et le choix de ne se centrer que sur la gestion des conséquences en en externalisant les tâches les plus répressives.

    ∞∞∞

    Mais alors que signifie cette « conversion » massive de Merkel à Hollande, de Sarkozy à Valls ? Comme pour le 11 janvier, la réponse est à rechercher dans les décisions qui sont prises à l’occasion de cette mise en scène médiatique et politique d’un humanisme européen exemplaire. Si le drame de janvier a débouché sur une décision prise à la quasi-unanimité de l’assemblée nationale de poursuivre les frappes aériennes en Irak, le drame de septembre se conclut par la décision de Hollande d’entamer des frappes aériennes en Syrie. Il n’y a même plus besoin de vote désormais et le consensus dans les déclarations est frappant. A l’unanimité tous les ténors de droite et du parti socialiste se sont déclarés favorables à ces frappes.

    1 [http://www.unhcr.fr/559e2ca6c.html]
    2 Ibid,
    3 http://data.unhcr.org/syrianrefugees/regional.php#_ga=1.59556077.1786272980.1441787559
    4 Jean-Claude Chasteland , La population mondiale à l’orée du XXIème siècle, in Jean-Claude Chasteland et Jean-Claude Chesnais (coord.) , La population du monde, Les Cahiers de l’INED, n° 149, Paris, 2002, p. 57.
    5 http://www.unhcr.fr/53edc9a39.html
    6 http://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2015/09/03/refugies-l-hypocrisie-d-eric-ciotti_4744749_4355770.html?xtor=SEC-33280887
    7 http://www.lepoint.fr/societe/hollande-la-france-prete-a-accueillir-24-000-refugies-07-09-2015-1962619_23.php
    8 Marc Ferro, Histoire de France, Odile Jacob, Paris, 2003.
    9 Déclaration à l’université d’été du Front National, le 5 septembre 2015.
    10 http://www.ouest-france.fr/roanne-le-maire-pret-accueillir-les-refugies-sils-sont-chretiens-3669778
    11 http://www.liberation.fr/monde/2015/09/04/ne-dites-plus-migrant_1375999
    12 Voir notre article de mars 2015 : https://bouamamas.wordpress.com/2015/03/22/le-mur-meurtrier-de-la-mediterranee-lassassinat-institutionnel-de-masse-de-lunion-europeenne/
    13 http://www.huffingtonpost.fr/alexis-kraland/pozzallo-centre-tri-refugies_b_8089980.html Source : Investig’Action, 11 septembre 2015

     

     
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  • Journalistes capitalistes, John Lennon, Cuba et les années 60, les politiques se défilent face aux terrorismes

    Le Grand Soir
    Journal Militant d'Information Alternative
     
    Cette semaine
    Claude Jacqueline HERDHUIN
    Attentat à Lahore revendiqué par les talibans pakistanais, qui ont déclaré avoir visé spécifiquement la communauté chrétienne. Mais selon l’inspecteur de police adjoint, Haider Ashraf, la majorité des victimes sont musulmanes. Les journaux insistent sur l’aspect antichrétien de cet attentat, ce qui ne peut qu’attiser l’islamophobie. Une fois de plus, utilisons notre raison et refusons de participer à cette chasse aux sorcières et aux sorciers. Je compatis avec toutes les victimes, peu importe leur (...) Lire la suite »
     
    Henri MALER, Yves REBOURS
    Nous reprenons ici de larges éléments d’un article d’Henri Maler et Yves Rebours (pour le site Acrimed) sur la dérive procapitaliste du discours pournalistique en temps dez grèves et de manifestations. I. Consensus sous surveillance « Réforme » : Ne plus dire : « les travailleurs combattent les politiques libérales qui favorisent chaque jour davantage les revenus du capital et dissolvent l’Etat social ». Ecrire : « Une autre chose dont on peut être sûr – et qui nourrit l’antienne d’un pays (...) Lire la suite »
     
    Frederic LORDON
    Au point où nous en sommes, il faut être épais pour ne pas voir qu’il en va dans les mouvements sociaux actuels de bien plus qu’une loi et ses barèmes d’indemnités. Mais l’épaisseur, en tout cas en ce sens, c’est bien ce qui manque le moins à ceux qui nous gouvernent et à leurs commentateurs embarqués. Aussi tout ce petit monde continue-t-il de s’agiter comme un théâtre d’ombres, et à jouer une comédie chaque jour plus absurde, les uns affairés à peser au trébuchet leurs concessions cosmétiques, les autres (...) Lire la suite »
     
    Moon of Alabama
    La libération de Palmyre est un tournant décisif dans la guerre contre la Syrie. Bien que l’armée arabe syrienne et ses alliés aient auparavant remporté des succès militaires, la publicité autour de la sécurisation des célèbres ruines romaines de Palmyre est d’une valeur bien supérieure à toutes les victoires antérieures. Elle va mettre fin en partie aux récits mensongers du conflit. Le gouvernement syrien n’est plus « le régime d’Assad » et l’armée arabe syrienne n’est plus appelée les « forces d’Assad (...) Lire la suite »
     
    Alain GRESH, Jean-Pierre SERENI
    Il n’existe aucun rapport entre la politique française au Proche-Orient ou au Sahel et les attentats dont elle a été la victime : telle est la doxa qui domine à Paris. Ce ne seraient pas les guerres que la France mène « là-bas » qui provoqueraient des répliques meurtrières sur son sol, mais la haine de « nos valeurs », de « nos idéaux », voire du mode de vie hexagonal. Pourtant, toute l’histoire récente enseigne le contraire. Au temps des colonies, le scénario des expéditions militaires outre-mer était (...) Lire la suite »
     
    France : installation d’un Etat policier (partie 1).
    Jean-Claude PAYE
    A une large majorité et quasiment sans débat, l’Assemblée nationale vient d’adopter ce 9 mars, le nouveau projet de loi de réforme pénale « renforçant la lutte contre le terrorisme et le crime organisé ». Ce texte doit encore passer au Sénat et, étant en procédure accélérée, il ne doit faire l’objet que d’une seule lecture par Chambre. Le projet fait entrer dans le droit commun, des dispositions considérées comme relevant d’un droit d’exception. Ainsi, dans le texte transmis pour avis au Conseil d’Etat, le (...) Lire la suite »
     
    Moon of Alabama
    Donald Trump est allé hier à Washington rencontrer discrètement les gros bonnets du parti républicain pour obéir au lobby israélien, et pour être passé au crible des rédacteurs néo-conservateurs* du Washington Post. Le parti républicain a renoncé à s’opposer à Trump. Voir par exemple le fonctionnaire républicain, John Feehery, qui disait le 29 février que Trump instaurerait un régime autoritaire et aussi ceci : Nous avons battu les nazis et les Japonais dans la seconde guerre mondiale et protégé la liberté (...) Lire la suite »
     
    Koldo Campos Sagaseta
    Des fois que ces latrines de la communication oublieraient d’en parler, ce qui ne saurait rater, je vous ferai remarquer que c’est Cuba qui peut aider les États-Unis à mener à bien leur transition démocratique pour qu’enfin ils cessent d’être ce pays qui accumule la dette publique la plus monstrueuse, qui gaspille à lui seul la moitié des ressources de toute notre planète, qui consomme la plus grande quantité de drogues et qui viole le plus les Droits de l’Homme tout en multipliant le nombre de ses (...) Lire la suite »
     
    Le retour du Rock à Cuba ?
    José Perez
    A l’occasion du concert des Rolling Stones à Cuba, Le Grand Soir vous présente un article daté de 2001. Une des choses au sujet de Cuba qui m’a surpris lorsque j’y suis finalement retourné en 1979, après l’avoir quitté à l’age de neuf ans en 1960, était la quantité de Rock & Roll "occidentale" pure et dure et de musique de jeunes qu’on pouvait entendre - y compris les Beatles et Bob Dylan à ses débuts, considéré déjà comme ringard aux Etats-Unis qui étaient envahis par les monopoles de l’industrie de (...) Lire la suite »
     
    Yann FIEVET
    Un fait dramatique doucement s’impose en nos vieilles démocraties : le politique n’y semble plus enclin à reconnaître la légitimité des sciences sociales dans la nécessaire compréhension des choses de la Cité. Nous devrions pourtant nous souvenir que les périodes sombres de l’Histoire ont d’abord été obscurcies par le rabougrissement de la pensée et par la répression des érudits dont les incessants questionnements des faits politiques et sociaux devenaient des obstacles à une nouvelle vulgate. Il semble bien (...) Lire la suite »
     
    Patrick COCKBURN
    La capture de Salah Abdeslam, considéré comme le seul planificateur survivant des attentats de Paris, signifie que les médias se concentrent à nouveau sur la menace d’une attaque terroriste par l’Etat islamique. Des questions se posent sur les raisons de qui ont permis à l’homme le plus recherché d’Europe à être en mesure d’échapper à la police pendant si longtemps, bien qu’il vivait dans son district natal de Molenbeek à Bruxelles. La télévision et les journaux s’interrogent désormais sur les chances (...) Lire la suite »
     

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  • Regards sur le continent américain

     

    Le MS21 a inscrit dans sa Charte le paragraphe suivant :

     

    «.....il y a dans le monde des peuples qui ne se résignent pas au vide politique et refusent résolument les dégâts sociaux et environnementaux du capitalisme et de sa forme actuelle le néo-libéralisme . Le MS21 a donc tourné ses regards vers les pays d' Amérique du sud – tels le Venezuela, l'Equateur, la Bolivie – qui ont élaboré de nouvelles constitutions et mis en place des politiques sociales au service de leur peuple. »

    Et nous avons appelé notre association « Mouvement pour un socialisme du 21è siècle » en référence à une déclaration de Hugo Chavez en 2006 lors du Forum Social Mondial à Caracas.

     

    Notre charte a été écrite fin 2014 . Les choses ont hélas évolué depuis cette date et on a vu en 2015 les situations se dégrader dans plusieurs pays de ce continent .

    Avons-nous eu tort de nous réjouir trop tôt, trop vite d'une victoire de gouvernements progressistes au Venezuela, en Argentine, en Bolivie, en Equateur ? Ces revers seront-ils passagers ou durables? Faut-il être optimiste ou se résigner à un retour de la réaction pour longtemps ? Que dire du rôle des Etats-Unis dans ces événements?

     

    A) Omniprésence des Etats-Unis

     

    1- Doctrine de Monroe

     

    Le 2 décembre 1823, James Monroe, énonce la doctrine qui portera son nom et fixera pour un siècle et demi les fondements de la diplomatie américaine (« l'Amérique aux Américains»). Dans un long discours il interpelle directement les puissances européennes ( en particulier l'Espagne et le Portugal). Il leur déclare :

    1) Les États-Unis ont reconnu l'indépendance des nouvelles républiques latino-américaines ; en conséquence de quoi, l'Amérique du nord et l'Amérique du sud ne sont plus ouvertes à la colonisation européenne.
    2) Les États-Unis regardent désormais toute intervention de leur part dans les affaires du continent américain comme une menace pour leur sécurité et pour la paix.
    3) En contrepartie, les États-Unis n'interviendront jamais dans les affaires européennes.





    2- Le corollaire Roosevelt

    Au début du XXe siècle Théodore Roosvelt (1901-1909) prononce le corollaire de la doctrine de Monroe . Ce discours ne prône plus une neutralité absolue : il affirme que son pays ne souffrirait pas que l'on s'oppose frontalement à ses intérêts. Il permet ainsi de justifier l'interventionnisme des Etats-Unis tous azimuts et plus particulièrement en Amérique latine. Ce corollaire a provoqué l'indignation des dirigeants européens.

     

    Depuis ces déclarations, les Etats-Unis ont considéré le continent américain dans son ensemble comme sa « chasse gardée » et l'Amérique latine son arrière-cour.

     

    3- Déclaration de Harry Truman

    Le 12 mars 1947, devant le Congrès, le Président Truman énonce la doctrine qui porte son nom :

    La sécurité des Etats-Unis est en jeu en tout lieu où le communisme menace de s'imposer.

    Les Etats-Unis craignent donc par-dessus tout la progression du communisme qui, disent-ils, est une menace pour leur sécurité . D'où la chasse, l'arrestation, l'exil ou l'assassinat des communistes chez eux ( maccharthysme), les guerres de Corée et du Vietnam et la lutte contre tout gouvernement progressiste en particulier sur le continent américain.



    B) Tout gouvernement progressiste est menacé s'il prend des mesures contraires aux intérêts des Etats-Unis.

     

    Quelques exemples :

    *Au Guatemala, Jacobo Arbenz président de 1951 à 1954, avait voulu donner 90 000 hectares de parcelles de terre non cultivée aux plus pauvres du pays, exproprier l’United Fruit Company et instaurer une taxe d’importation sur les produits. Il fut renversé par la CIA.

    * Au Nicaragua, les rebelles du Front sandiniste de libération (FSL) , qui dénoncent la corruption et la brutalité du dictateur Somoza, s'emparent du pouvoir en 1979. Immédiatement ils proclament les premières mesures: expropriations des grands propriétaires, réforme agraire, nationalisations des ressources naturelles...Un rapprochement s'effectue avec Cuba, l'URSS et les pays de l'Europe de l'Est, suscitant la méfiance des Etats-Unis qui craignent que cette influence ne fasse tâche d'huile en Amérique latine. Au cours des années 1980, les Etats-Unis décrètent un embargo économique et appuient les rebelles, « les contras » , qui veulent renverser le gouvernement sandiniste. Celui-ci sera battu aux élections de 1990 et la droite libérale, soutenue par les étatsuniens, reprend le pouvoir . Fin de la révolution sandiniste...? En 2007, puis en 2012, Daniel Ortéga chef historique du FSL est réélu à la présidence de la République mais est-il encore un révolutionnaire ?

    * Au Chili, Salvador Allende , socialiste, est élu président de la République le 4 septembre 1970. Dès 1971, le président Richard Nixon a donné l'ordre à la CIA de « faire crier » l'économie chilienne car il fallait briser le rêve d'une transition pacifique vers un socialisme démocratique avant qu'il ne soit trop tard...un « nouveau Cuba » serait intolérable pour l'Empire. Très vite la situation économique du Chili se dégrade en raison de grèves incessantes, surtout celle des camionneurs largement financée par la CIA . Et le rêve socialiste se termine par le coup d'état militaire du 11 septembre 1973, le bombardement du palais présidentiel « La Moneda » et le suicide de Salvador Allende. Puis ce sera la longue nuit avec Pinochet durant 17 ans...

    * En République dominicaine, les coups d'état se succèdent , l'instabilité est permanente ; Juan Bosh le président de gauche élu en décembre 1962 est renversé 9 mois plus tard. Et le 28 avril 1965, par crainte de voir le pays tomber sous contrôle communiste, avec le retour possible de Juan Bosh, les militaires étatsuniens débarquent en République dominicaine pour, officiellement, protéger leurs ressortissants et les évacuer.

    * A la Grenade, après son coup d'état de 1979, Maurice Bishop met en place un gouvernement populaire et révolutionnaire et se rapproche considérablement de Cuba. Cette politique causa sa perte et il fut assassiné par ses opposants le 19 octobre 1983. Quelques jours après, la Grenade fut envahie par une coalition dirigée par les Etats-Unis et on assista à un déploiement de forces considérables qui eut vite fait de mater la petite armée du pays.

    * Plus récemment, au Honduras, en 2006, le président élu démocratiquement Manuel Zelaya de tendance centre-droit n'a rien du dangereux révolutionnaire . Mais il se rend à Cuba, nomme un ambassadeur à La Havane, se rapproche de Daniel Ortega, fait adhérer son pays à Petrocaribe et à l'ALBA (1) . Il proteste en septembre 2007 contre l'ingérence des Etats-Unis au Venezuela et en Bolivie. Tout cela inquiète fortement la Maison Blanche...et Zelaya est arrêté par les militaires et expulsé vers le Costa Rica.

     

    Ces quelques exemples suffisent à pointer l'influence de Washington sur nombre de pays des Caraïbes , d'Amérique centrale et du sud.



    C) Quand l'impérialisme américain est mis en échec...

    Inutile de rappeler la cuisante défaite de l'Empire yankee au Vietnam après 12 ans d'une guerre atroce.

    Et si puissant soit-il, l'histoire de l'Amérique latine montre que l’impérialisme américain peut être mis en déroute.

     

    * Le plus bel exemple est bien sûr celui de Cuba.

    Dès le début, en 1959, le gouvernement révolutionnaire a dû faire face à l'hostilité et aux agressions multiples de son puissant voisin. Cuba a démantelé plusieurs réseaux terroristes financés par la CIA et par la communauté anti-castriste vivant à Miami . Fidel Castro a échappé à des centaines de tentatives d'assassinat. Les tentatives de débarquement ont échoué ( épisode de la baie des cochons), plus de 3000 attentats ont fait des milliers de morts. Et voilà 57 ans que Cuba résiste...

     

    *Au Venezuela, en avril 2002, le peuple a mis en déroute les putschistes qui avait renversé le président Hugo Chavez. Ce coup d'état fomenté par la droite revancharde et soutenu par les Etats-Unis a échoué lamentablement et n'a duré que 3 jours . Belle victoire du peuple venezuelien qui a ramené son cher Président à Miraflorès , avec l'aide d'une partie de l'armée restée loyaliste !

     

     

     

    D) Arrivée de gouvernements progressistes dans les années 2000

    Depuis l'arrivée au pouvoir de Hugo Chavez en 1998, une « vague rouge » a déferlé sur plusieurs pays du cône sud . Effet de contagion ?

     

    * En Bolivie, Evo Moralès remporte l'élection présidentielle en 2005 avec 53,7 % des voix. Les élections législatives se déroulent le 18 décembre 2005 et sont remportées par le MAS le parti présidentiel. D'importantes réformes économiques sont alors mises en œuvre : le 1er mai 2006, Evo Morales annonce par décret la nationalisation des hydrocarbures et la renégociation de tous les contrats des entreprises étrangères dans un délai de 180 jours. L'objectif est que 82 % des revenus des hydrocarbures soient versés à l'État au lieu de 18 % jusqu'alors. D'autres réformes progressistes suivront : réforme agraire, nouvelle constitution, allocation versée aux personnes indigentes de plus de 60 ans, allocation pour l'éducation des enfants, campagne d'alphabétisation, postes de santé , électrification etc....La Bolivie devient membre de l'ALBA(1).

    * L'Equateur aussi connaît un virage à gauche avec l'élection de Raphaël Corréa qui devient Président de la République fin 2006. Conformément à sa promesse électorale, Correa annonce la tenue d'un référendum le 18 mars 2007 pour mettre en place une assemblée nationale constituante chargée de rédiger une nouvelle constitution. Le projet de constitution, élaboré par cette constituante, a été approuvé par référendum le 28 septembre 2008 à une large majorité. Correa a immédiatement annoncé sa volonté de renégocier la dette équatorienne et les contrats de la société énergétique Petro Ecuador avec les partenaires étrangers. Le 9 juillet 2007, Rafael Correa crée par un décret présidentiel, la Commission pour l'Audit Intégral de l'Endettement Public. Cette commission travaillera 14 mois et son rapport montrera que la totalité de la dette commerciale de l'Équateur est illégale et/ou illégitime. En conséquence à partir de novembre 2008 Rafael Correa suspend le paiement d'une grande partie de la dette et l'économie réalisée est de 7 milliards de dollars qui seront versés au budget de la santé et de l'éducation. Par ailleurs , il a annoncé la diminution par deux de son salaire et la diminution des salaires des hauts fonctionnaires équatoriens.

    * Après la terrible crise économique des années 2001-2002, l'Argentine retrouve une ère de stabilité et de progrès social avec l'élection de Nestor Kirchner ( 2003-2007) puis de son épouse, Cristina Fernandez de Kirchner élue en 2007. Nestor Kirchner, péroniste de centre gauche, s'attaque au problème crucial de l'énorme dette extérieure et déclare le défaut, demande et obtient la restructuration de cette dette. De 2003 à 2007 le PIB repart à 9 % de croissance annuelle, en produisant une réactivation économique dans tous les secteurs, une forte réduction de la pauvreté et un retour de la classe moyenne. De grandes entreprises qui avaient été privatisées par Carlos Menem dans les années '90 sont re-nationalisées comme la compagnie aérienne Aérolas Argentinas et la compagnie pétrolière YPF. Mais en 2008 la croissance ralentit, l'inflation revient la situation s'assombrit...

    Le Venezuela et le Brésil ont connu aussi une période faste d'environ 15 ans où les classes populaires ont vu leur situation s'améliorer : l'extrême pauvreté a reculé, le chômage a baissé, l'analphabétisme a quasiment disparu, le taux de scolarisation et l'accès aux soins ont augmenté, la démocratie s'est renforcée.



    E) Evolution de la statégie des Etas-Unis

    Les EU ne s'engagent plus directement , on ne verra plus les marines débarquer avec toute leur artillerie lourde, précédés par des bombardements aériens comme ce fut le cas à La Grenade, au Panama ou en République Dominicaine...Maintenant, leur statégie est beaucoup plus subtile et plus « politiquement correcte » : il s'agit d'aider les opposants de ces « régimes » qualifiés de communistes ou de socialistes (pour les étatsuniens les 2 vocables sont équivalents) à retrouver la démocratie ; voyons comment s'exerce cette ingérence :

    1- Le financement des partis et mouvements d'opposition par l'intermédiaire d'organisations non-gouvernementales (ONG) caritatives qui dépendent de l'USAID ( United States Agency for International Development). Officiellement, L’USAID a pour mission d'aider à réduire la pauvreté, promouvoir la démocratie et la croissance économique, soulager les victimes des catastrophes naturelles et prévenir les conflits.

    C'est bien évidemment une couverture qui sert à déstabiliser les gouvernements qui ne plaisent pas à la Maison Blanche. L'USAID a été expulsé de Russie, de Bolivie , du Venezuela et d'Equateur sous les accusations d'espionnage et de corrupteur des citoyens.

    2- La désinformation à grande échelle en soutenant la presse locale qui est en grande partie aux mains de la droite et par l'intermédiaire de sa chaine de télévision CNN qui arrose tout le continent.

    3- Des campagnes de diffamation accusant les dirigeants de toutes les turpitudes : ce sont d'affreux dictateurs qui bafouent les droits de l'Homme et qui gouvernent par la terreur, ce sont des narco-trafiquants, des mafieux, des corrompus, des analphabètes... ! Que n'a-t-on pas entendu ! Obama a même signé un décret qui stipule que le Venezuela est un danger pour la sécurité des Etats-Unis.

    4- Payer des mercenaires, les entraîner, les armer pour aller déstabiliser les pays par des actions violentes. L'exemple le plus connu est celui des « contrats » envoyés au Nicaragua dans les années 80 pour renverser le pouvoir sandiniste.



    F) Importance de l'engagement des peuples

    Plusieurs présidents ont été chassés du pouvoir par d'importantes manifestations de masse avant la fin de leur mandat officiel : Pérez au Venezuela (1993) , De la Rua en Argentine ( 2001), Collor au Brésil (1992), Mahuad en Équateur ( 2000) Fujimori au Pérou (2000) . Les mouvements sociaux ont chassé ces dirigeants incapables et/ou corrompus et ont permit l'émergeance de gouvernements progressistes.

     

    Mais, aujourd'hui, on assiste à un retournement de tendance : retour d'un président de droite en Argentine, Mauricio Macri, opposition anti-chaviste devenue majoritaire à l'assemblée nationale de Caracas, difficultés de Raphaël Corréa qui perd un référendum, manifestations d'opposants sécessionnistes en Bolivie, scandales qui déstabilisent la Présidente Dilma Roussef au Brésil. Tous ces événements peuvent faire craindre la fin des régimes progressistes. Qu'en est-il ?

     

    Il faut d'abord voir que ces retournements ont des causes conjoncturelles : la crise financière mondiale de 2008 n'a pas épargné l'Amérique latine et la chute du prix des matières premières et principalement de celui du baril de pétrole brut ont provoqué une baisse catastrophique des PIB. Il a fallu couper dans les budgets sociaux provoquant ainsi le mécontentement des classes populaires. En 2015 le PIB chute de 10 % au Venezuela, de 3% au Brésil, il stagne en Argentine et en Equateur.

    Les partis de droite ont exploité ce mécontentement au maximum, dans les journaux et à la télévision, pour retourner l'opinion .

     

    Mais on peut identifier d'autres raisons : ces gouvernements ont gardé la même politique extractiviste que leurs prédécesseurs et n'ont pas réussi à diversifier leur économie. C'est vrai surtout pour le Venezuela qui a vécu confortablement sur la rente pétrolière pendant 15 ans en ne développant pas suffisamment ni l' agriculture ni une industrie de transformation. Pourquoi cet immobilisme ? Une des raisons est politique : les patrons du privé ont refusé de « collaborer » . Hugo Chavez leur a proposé « un effort national de relance productive » au cours d'un colloque réunissant plus de 500 patrons le 11 juin 2008. Rien n'a bougé. Dilma Roussef a cédé aux exigences du patronat brésilien ( baisse des taux d'intérêt, dévaluation du réal, baisse des coûts salariaux) mais ni la production ni les investissemnts n'ont progressé.

     

    Les capitalistes ont la possibilité d'étrangler l'économie d'un pays et ils le font sans vergogne quand il s'agit de défendre leurs intérêts et leur pouvoir comme on l'a vu au Chili en 1973 et comme cela se produit maintenant au Venezuela ou au Brésil.

    Tant que les grands moyens de productions et d'échanges seront dans les mains des classes capitalistes, aucune politique de gauche ne pourra survivre durablement c'est bien là l'enseignement que l'on peut tirer de la situation actuelle en Amérique latine.

    Les luttes syndicales, citoyennes, ont permis l'arrivée au pouvoir de dirigeants de gauche mais le pouvoir politique ne suffit pas : il faut aussi prendre le pouvoir économique ce qui demande du temps. Les tentatives permanentes de déstabilisation ont fait perdre aux nouveaux dirigeants beaucoup de temps et d’énergie , ont éloigné les gouvernements des mouvements sociaux. A l’évidence, faire reculer la pauvreté ne suffit pas si les consciences ne suivent pas, si une nouvelle idéologie n’imprègne pas les esprits.

    Il est curieux d'entendre une venezuelienne dire : « Maintenant que je ne suis plus pauvre, je vote à droite » Après la victoire dans les urnes, il faut gagner la bataille des idées...ceci demande du temps...

    Cependant, tous ces peuples qui vont subir des régressions sociales savent qu'il existe des alternatives au néolibéralisme et les nouveaux maîtres ne pourront pas dire « il n'y a pas d'autre alternative ».

    ___________________________________________

    Notes :

    (1) Petrocaribe : c'est une alliance créée en juin 2005 à l'initiative de Hugo Chavez qui regroupe maintenant 18 pays : le Venezuela et 17 pays de la Caraïbe . Il s'agissait de fournir du pétrole à des prix inférieurs à ceux du marché lorsque ce prix était très élevé.

     

    ALBA = L'Alliance bolivarienne pour les peuples de notre Amérique est née le 14 décembre 2004 à La Havane, par la Déclaration conjointe signée par les commandants Hugo Chavez et Fidel Castro en opposition à la proposition de la zone de libre-échange des Amériques (ZLEA) , promue par Washington. C'est une organisation politique, culturelle, sociale et économique pour développer la coopération et la solidarité entre les 11 membres qui ont adhéré.

     

    Sources :

    Les enfants cachés du général Pinochet (Maurice Lemoine- Don Quichotte Editions )

     

    Le Monde diplomatique ( Janvier 2016)

     

    Video : mailto: https://youtu.be/rsseG0OhXK0

     

    Site internet : mailto:www.romainmigus.com

     

    Blog : http://www.humanite.fr/auteurs/jean-ortiz-544965



     

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  • Un réfugié, ça vaut combien d’euros ?

     

    Ainsi, l’Union Européenne vient de signer avec la Turquie cet « Accord de la honte ». Qui en fait supprime le droit d’asile, un droit fondamental pourtant garanti par l’article 14 de la Déclaration universelle des Droits de l’Homme : « Devant la persécution, toute personne a le droit de chercher asile et de bénéficier de l'asile en d'autres pays. »

     



    Le troc du siècle ! En échange de six milliards d’euros cédés à Ankara, on leur refile nos réfugiés politiques, on les charge du sale boulot (les prisons turques sont très réputées) et on se débarrasse des Droits de l’Homme ! Clairement, c’est une « bonne affaire » puisqu’un million de réfugiés sont arrivées en Europe en 2015. Du point de vue comptable, un réfugié vaut donc six mille euros. Pas cher pour une puissance qui prétend donner au monde entier des leçons sur les droits de l’homme !

    Tout ceci, nous le devons au bordel semé – par les interventions occidentales ! – en Irak, en Afghanistan, en Libye et en Syrie. Or, ce « marché des réfugiés » a encore de belles perspectives de croissance tant que l’Occident s’acharnera à décider à la place des nations puisqu’Obama a dit récemment : « Le ‘leadership américain’ implique de forcer la main des Etats qui ne font pas ce que nous voulons qu’ils fassent » . Et puisqu’on ne cesse pas d’utiliser des terroristes pour déstabiliser des Etats (« Les USA ont créé Al-Qaida », a reconnu Hillary Clinton ). Bref, on peut estimer beaucoup plus élevé encore le nombre d’êtres humains qui seront obligés de fuir la guerre et le terrorisme.

    Bien sûr, nos politiques ressortent l’habituel argument « Nous ne pouvons accueillir toute la misère du monde. » Eh bien, il ne fallait pas commencer par la créer en essayant de voler le pétrole… Pardon, « éliminer les armes de destruction massive » ! Ou « combattre le terrorisme » (joli résultat !). Ou « apporter la démocratie » (avec l’aide des Saud, Qatar et Erdogan !).

    Il y aurait pourtant une solution simple et honnête : dire non aux USA et quitter l’Otan qui apporte la souffrance partout où elle intervient. Accepter des relations sur pied d’égalité avec toutes les nations. Appliquer la Charte de l’ONU qui interdit l’ingérence et la guerre. Bref, respecter le droit.

    Apparemment, c’est trop cher pour nos grandes « démocraties » !

    Source : Investig’Action

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  • Arabie Saoudite : DEUX POIDS, DEUX MESURES. Sauvons le poète Ashraf Fayad condamné pour apostasie par l’Arabie Saoudite

    site du PRCF :www.initiative-communiste.fr

    Révélatrice est la médiatisation, l’écho que tel ou tel événement rencontre suivant le lieu et la nature des régimes qui prennent telle ou telle décision.

    Imaginons un instant qu’à Cuba un homme soit condamné à mort pour son opinion.

    Et  comparons cela au silence de plomb des autorités politiques et médiatico-intellectuelles face aux meurtres d’État du pouvoir d’….Cela rappelle le comportement du gouvernement Daladier d’avant-guerre qui avait demandé aux ministres juifs du gouvernement français de s’abstenir de participer au dîner officiel organisé à l’occasion de la visite de von Ribbentrop, ministre des affaires étrangères de IIIe Reich.

    Le même courage, les mêmes choix. Ceux de la défaite*.

     


     

    Sauvons le poète Ashraf Fayad condamné pour apostasie par l’Arabie Saoudite

    > Le poète palestinien a été condamné à mort pour « apostasie ».

    > En d’autres termes, l’Arabie saoudite lui reproche d’avoir tenu des propos contre Dieu et contre le royaume. Une accusation qui repose sur un témoignage unique. « J’ai été très choqué mais c’était attendu. Je n’ai cependant rien fait pour mériter la mort« , a-t-il expliqué au journal britannique The Guardian.

    > Ashraf Fayad, qui avait représenté l’Arabie saoudite lors de la Biennale de Venise en 2013, était inquiété par la police religieuse du royaume pour des poèmes aux idées athées.

    > Le poète avait déjà été détenu en 2013, pour blasphème. Relâché le lendemain, Ashraf Fayad avait de nouveau été arrêté en janvier 2014. Cette fois-ci, il avait passé 27 jours au poste avant de se retrouver en prison.

    > En 2014, il est alors condamné à quatre ans de prison et 800 coups de fouet en première instance après une plainte provenant d’un groupe de discussion culturel dans un café d’Abha (sud-ouest). Un homme affirmait alors l’avoir entendu tenir des propos contre Dieu, tandis qu’un religieux l’accusait de « blasphème » dans un recueil de poèmes que le Palestinien a écrit il y a 10 ans.
    > Lors du premier procès, Ashraf Fayad avait démenti que son ouvrage soit « blasphématoire », mais s’était quand même excusé. La cour n’avait alors « pas voulu le condamner à mort ».

    > Mais selon l’ONG Human Right Watch, un autre tribunal est donc revenu sur cette décision, jugeant que « le repentir, c’est pour Dieu ». Privé de carte d’identité, le poète n’a pu bénéficier de l’aide d’un avocat pour se défendre.

    > Pour Ashraf Fayadh, cette condamnation vient après de nombreux problèmes rencontrés avec la police religieuse. Pour ses amis, qui avaient alors lancé une page de soutien, la police religieuse n’ayant trouvé aucune trace « d’incitation à l’athéisme » dans ses poèmes, elle l’avait poursuivi pour avoir fumé et pour arborer des longs cheveux.

    > Si je soutiens Ashraf aujourd’hui, c’est parce que je suis indignée et outrée par le sort qui lui est réservé, dans un pays qui ne cesse de violer les droits humains; l’Arabie Saoudite, où on coupe les têtes à coup de sabre, où on coupe les mains et les pieds, où on fouette sur les places publiques, et à qui on réserve les meilleures places et les meilleurs titres aux Nations Unies! N’est-ce pas une aberration, que d’attribuer la présidence du Conseil des droits de l’homme, à ce pays!

    > Je suis outrée, parce que Ashraf a été condamné pour ses mots, pour sa poésie et en tant que poète libre qui a déjà soutenu en Tunisie deux jeunes condamnés pour athéisme, je ne peux qu’apporter mon soutien à cet homme, à cet orfèvre des mots, condamné pour apostasie!

    > La liberté de conscience pour moi, doit être inscrite et garantie par toutes les constitutions du monde, pour permettre à chacun de croire ou de ne pas croire, de pouvoir changer de religion, d’être monothéiste ou polythéiste, déiste, panthéiste, agnostique ou que sais-je encore! Alors, je soutien Ashraf et les milliers d’Ashraf sur la planète qui au nom des théocraties et autres dictatures se font massacrer dans l’indifférence générale!

    > Cette pétition a aussi été lancée en Italie et en Espagne.

    > signer en ligne sur https://www.change.org/p/sauvons-le-po%C3%A8te-palestinien-ashraf-fayad-condamn%C3%A9-pour-apostasie-par-l-arabie-saoudite

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